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The Detective is Already Dead - C1 - Chapitre 1

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Chapitre 1

◆Au début du mystère, attouchements

« Tu es le brillant détective ? »

Les cours étaient terminés pour la journée, le soleil se couchait. Dans une salle de classe,
quelqu’un me tirait par la chemise et me réveillait de ma sieste pour m’interroger.

Mes yeux fatigués ne pouvaient pas vraiment distinguer son visage. Je vérifiais mes
souvenirs, mais je ne reconnus pas sa voix.

Apparemment, j’étais menacé par une fille que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam. Je ne
savais même pas pourquoi.

J’avais passé toute ma journée de lycée, de la sonnerie du matin à la fin des cours la tête
sur mon bureau. Cette fille me semblait être quelqu’un qui concourrait pour la place de
présidente du conseil des élèves ; peut-être qu’elle ne supportait pas de voir son
camarade dormir jusqu’à la fin de sa vie, elle m’avait donc fait la faveur de me réveiller, un
peu trop fort malheureusement … ou quelque chose comme ça ?

Non, si nous étions dans la même classe, je me souviendrais au moins de sa voix.

Cette fille était une parfaite inconnue pour moi.

Alors qu’est-ce que c’était ? Pourquoi me tenait-on par le col ? Et cette formulation est
littérale, elle me tenait toujours.

Mon cerveau encore fatigué n’était pas en mesure de déduire grand chose. Bien sûr qu’il
ne l’était pas ; je ne suis pas détective.

Attends, détective ?

« Ne reste pas planté là et réponds-moi. Es tu Kimihiko Kimizuka, le brillant détective dont
tout le monde parle ?»

C’était la première fois en un an que j’entendais ce mot affreux. Détective.

« Tu te trompes de personne. Maintenant, si tu veux bien m’excuser … »

« Attends. »

« Gweh, » sifflai-je. Les humains ne sont pas censés faire de sons comme celui-ci.

Aussi impossible que cela paraisse, elle avait enfoncé ses doigts dans ma bouche.

« Si tu ignores ma question, pas de pitié. Je toucherais le truc qui pendouille au fond de ta
gorge. »

« C’est … vraiment injuste … »

Enfin, je pus voit clairement son visage.

Emplie de volonté avec des yeux vifs. De longs cils. Un nez proéminent et des lèvres
crispées.

Un peu de ses longs cheveux noirs étaient tirés en une queue de cheval élégante sur le
côté de sa tête, comme tout lycéenne contemporaine.

… Je ne me souvenais pas que quelqu’un comme elle fréquentait mon lycée. Je ne peux
pas croire que je n’ai pas remarqué un personnage aussi dangereux. Je suppose que je
ne suis plus aussi vif qu’avant.

« Alors tu es Kimihiko Kimizuka, c’est ça ? »

Entendre mon nom complet encore et encore me faisait bizarre. A contrecœur j’hochai la
tête.

« Réponds moi correctement. Utilise des mots. »

« …Khah ! »

Le bout de ses doigts toucha ma luette et de la bile remonta du creux de mon estomac.

« Ugh, t’es le pire. Mettre autant de salive sur les doigts d’une fille que tu viens de
rencontrer — c’est quoi ton problème ? »

Je voulais lui demander qui a mis ses doigts dans ma bouche, mais ils touchaient toujours
le fond, et son autre main agrippait la chemise de mon uniforme. C’était pratiquement un
nouveau type de torture.

« Guh … ungh … »

« Hein ? Allez, tu pleures ? Un garçon de dix-huit ans … et rendre les doigts d’une fille
tous collants avec ta bave, ça ne suffit pas ? Tu veux pleurer et piquer une colère ? Tu
avais d’autres façons de jouer ? »

Je pouvais entendre ma dignité se briser. Je n’arrivais ni à retenir mes larmes, ni à avaler
ma bave. Qu’est-ce qui se passe ? Qu’ai-je fait pour mériter ça ?

« Oh, je vois. Oui, bien sûr : Tu voulais que je te serre contre moi, n’est-ce pas ? »

Elle pressa mon visage contre sa poitrine.

La douceur d’un marshmallow et l’odeur sucrée de son parfum menaçaient de faire fondre
mon cerveau.

Et le son de son cœur — C’est bizarre. Pour une raison quelconque, il me semblait
terriblement familier. Serait-ce possible que je ressente quelque chose de maternel chez
une fille de mon âge ?

… Nope. Pas moyen. J’touche pas à ça.

Pris entre le plaisir et l’agonie, je cria et m’arracha de son étreinte.

« C’est dommage. Ça ne m’aurait pas dérangé de jouer avec toi un peu plus longtemps. »

« ……….Hff … hff, n’utilise pas ton corps pour jouer avec les gens. N’enfonce pas le
visage d’un étranger dans tes seins », craquai-je.

Pour la première fois, elle sourit faiblement. « Je suis Nagisa Natsunagi, » déclarai-t-elle.
Le nom était approprié pour la saison — il signifiait « rive calme d’été » — et elle me tendit
sa main droite pour que je la serre.

« … Va laver ça d’abord, d’accord ? »

◆Assistant et client ; le détective n’est pas là

« J’aimerais te faire une demande. »

Quelques minutes plus tard, Natsunagi était revenue de la salle de bains, elle prit le siège
devant moi de sorte que l’on soit face à face.

« Tu n’as pas quelque chose à me dire d’abord. »

« Oui, je te demande de t’excuser d’avoir sali mes doigts. »

« Je suis censé m’excuser ?! »

Encore une fois, elle était totalement injuste. Ça l’était tellement que vous pouviez
rassembler toutes les injustices du monde, et ne pas en avoir assez pour couvrir cela.

« Quand on fait quelque chose que les gens n’aiment pas, s’excuser est la moindre des
choses, n’est-ce pas ? »

« Oh que oui, je pourrais donc te dire la même chose. »

« Oh, allez. N’importe qui penserait que j’ai fait quelque chose qui t’a déplu. »

Ouais, en fait — c’est exactement ce que j’ai dit !

C’est quoi son problème ? Est-ce que cette fille essaie d’improviser un sketch avec moi
seulement quelques minutes après notre première rencontre ?

« Tu as dit que ça ne te dérangerait pas que quelqu’un te fasse un coup comme ça ? »
demandai-je.

« Huh ? … C-c’est une bonne question. » Le regard de Natsunagi se mit brusquement à
errer. « T’as raison ; je ne pense pas vouloir subir ça. C’est normal. Ouais … »

« Hein ? Pourquoi rougis-tu ? Que signifie la fin de ta phrase ? »

Hey, son caractère sadique vient de partir. En fait, je commençais à me demander si elle
ne compensait pas quelque chose.

… Peut-être que je devrais vérifier.

« Tu préfères être aimée, ou … »

« Aimer. »

« Tu préfères ligoter quelqu’un, ou … »

« Être ligotée. »

« Je suis un peu juste ce mois-ci, alors … »

« Je vais payer. Combien il te faut ? »

« Wow, donc tu es vraiment masochiste. »

« Quo— ?! » Les lèvres de Natsunagi tremblèrent comme si je venais de lui faire une
révélation choquante.

Sérieusement, il est arrivé quoi à la fille avec qui je parlais il y a quelques secondes ?

« J-je ne le suis pas ! Je n’ai pas ce genre de … préférences !! … Et puis, ne voudrais-tu
pas arrêter de changer de sujet ? Je suis ici parce que j’ai une demande à te faire. »

Etait-ce la colère, l’embarras ou le coucher de soleil qui faisait rougir ses joues ?
Natsunagi frappa le bureau et se leva. Donc son défaut est d’être agressive.

Pendant un petit moment après, ses épaules se soulevaient pendant qu’elle reprenait son
souffle.

« Je cherche quelqu’un, » dit-elle. Ses yeux étaient incroyablement sérieux.

Je vois, une personne disparue. C’est pour ça qu’elle voulait un détective de génie,
hmm ?

« Tu es Kimihiko Kimizuka … n’est-ce pas ? »

… Bon sang. Elle ne va pas me laisser partir avant d’avoir obtenu une réponse.

« Oui, je suis un Kimizuka depuis avant ma naissance, et un Kimihiko depuis le jour de ma
naissance. »

« Et tu es un détective de génie ? »

« Malheureusement, tu te trompes de personne. Je n’ai pas de grand-père détective, et je
n’ai jamais été gavé d’une drogue bizarre pour finir par ressembler à un enfant. »

« Pas la bonne personne ? » Les sourcils de Natsunagi se levèrent. « Mais je l’ai vu dans
le journal. »

« Le journal ? »

Quand j’entendis cela, je me souvenus … mais je ne savais pas à quoi Natsunagi faisait
référence.

« L’édition du soir d’il y a trois jours, a propos d’un admirable lycéen qui a attrapé un
voleur de sac. »

« Oh, ça, hein ? »

« Oui, mais si c’était out, je ne ferais pas ça. » Natsunagi ouvrit alors son sac et le
retourna, déversant tout son contenu sur le sol. « Ce sont tous des articles sur toi. »

Il y avait un grand nombre de coupures de journaux.

« Tu t’es renseignée sur moi ? »

Chacun des articles portait mon nom et ma photo … C’était en partie pourquoi j’avais
demandé ; je ne savais pas quel incident Natsunagi avait vu dans le journal. »

« Hum, ‘Un super lycéen met fin à une fraude avant qu’elle ne se produise !’ ‘Trouver des
animaux perdus est sa spécialité. Boy K. retrouve un autre chaton perdu. ‘Un expert en
sauvetage secourt deux vies sur le chemin de l’école !’ — Si tu insistes sur le fait que tu
n’es pas un excellent détective, qu’est-ce que tu es ? »

Voilà à quoi ressemblait mon quotidien ces jours-ci. Je me retrouve toujours impliqué dans
ces incidents constamment, et maintenant, je suis complètement habitué à ça.

Je ne pensais pas que cela ferait de moi un « détective de génie, » mais … Eh bien, je
savais ce qu’elle essayait de dire.

« Tu exagères. Allez, ne m’surestimes pas. »

Le fait que je rencontre des problèmes, et que par chance je les résolve, était dû à la
façon dont les problèmes me trouvaient toujours. Ce n’est pas comme si j’avais des
compétences particulières.

Il y a longtemps, ces expériences me rendirent trop fier de moi. Cependant, il y a un an,
j’ai été forcé de voir qu’elles ne valaient absolument rien.

Je ne veux donc pas que quelqu’un pense que je puisse faire encore plus. Désolé, mais je
ne suis pas un détective. Pour l’instant, cette vie tiède me convient parfaitement.

« Quelle modestie, » dit Natsunagi.

« Eh bien, merci. »

« C’était pas un compliment. »

« Quoi, c’en était pas un ?! »

« Tu n’arrives même pas à voir tes propres capacités, pourquoi je te ferais un
compliment ? »

Aha. Apparemment, c’était sa marque de sarcasme.

« Eh bien, si je ne peux même pas voir mes propres capacités, qu’est-ce qui te fait penser
quelqu’un d’autre pourrait faire mieux ? »

« Tu dis que personne ne te connaît mieux que toi-même ? T’es bien sûr de toi. »
Natsunagi croisa les bras, serrant sa propre poitrine, et émit un petit grognement. « Les
opinions subjectives sont les choses les moins fiables au monde. Les objectives sont les
plus importantes. Ai-je tort ? » me demanda Natsunagi en tirant à nouveau ma chemise,
ce qui me rapprochait d’elle.

Ses lèvres humides étaient juste là. Son souffle était doux et chaud. Ses yeux rouge rubis
creusaient un trou entre les miens.

Elle continua. « Tout ce que tu as accompli est un fait. Cela veut dire que la façon dont
nous prônons nos accomplissements, et comment les comparer entre-eux, dépend
entièrement de ‘quelqu’un’ d’autre. Tu ne crois pas ? »

Son regard franc et hautain me rappelait fortement une autre personne. Quelqu’un qui
n’existe plus.

« … Donc tu as dit que tu cherchais quelqu’un ? »

Oui, j’en avais assez d’être aussi proche d’elle. Je repoussai les épaules de Natsunagi et
nous nous retrouvâmes face à face.

« Oui … ? »

Je sais ; elle m’a bien eu. Mais pour le bien de ma fierté, je tiens à souligner que
Natsunagi ne m’a ni raisonné, ni persuadé de quelque manière que ce soit.

C’est juste que maintenant que je voyais l’ombre d’une autre personne en elle, c’était tout
ce que je pouvais faire.

Bon sang. Je suis bien formé, hein ?

« Tu acceptes le rôle de détective ? » Soudain, l’émotion sur le visage de Natsunagi se
transforma en choc. Il y avait quelque chose d’étonnamment enfantin dans la façon dont
son expression changeait d’un moment à l’autre.

« Non, je ne peux pas être détective. Mais … »

« Mais ? »

« Si tu te contentes d’un assistant, j’accepte le job. »

Natsunagi fit un sourire chagriné en coin. « Qu’est-ce que ça veut dire ? »

Désolé, mais c’était mon rôle depuis quatre ans. « Et ? Qui cherches-tu ? » Trouver
quelqu’un ne devrait pas prendre tant de temps que ça, pensai-je en m’étirant.

Avec un visage impassible, Natsunagi me répondit, « Bonne question, Je ne sais pas. Je
veux que tu découvres qui je cherche. »

Bon, je suppose que ça collait. Pour une fille qui avait déclaré que les opinions subjectives
sont les choses les moins fiables au monde, c’était un problème très approprié.

◆Dis, à qui appartient ce cœur ?

« Alors quoi ? Tu me dis que tu as cette impression constante d’oublier quelqu’un ces
derniers temps, mais tu ne sais pas qui ? »

Sur le chemin du retour, après cette conversation, Natsunagi et moi étions dans un café,
et nous discutions à nouveau de sa demande autour d’une boisson.

« C’est ça. Il y a quelqu’un que je dois absolument trouver, je dois lui parler, mais je n’ai
aucune idée de qui il s’agit. Je ne pourrais même pas deviner ni son sexe, ni son âge, ni
où il vit … Ooh, c’est bon. »

Souriant faiblement, Natsunagi porta sa tasse à ses lèvres. Même si elle ne faisait que
boire un café, elle était aussi belle qu’une image. Elle en a de la chance.

Quand à moi, je ne sais pas combien de fois mon ancienne partenaire me répétait qu’elle
oublierait mon visage ennuyeux si elle ne le voyait pas pendant quelques jours.

« … Quoi ? Pourquoi tu me regardes comme ça ? » Natsunagi semblait enfin avoir
remarqué mon regard ; elle repoussa un peu sa chaise. Elle tripotait l’ourlet de sa jupe en
me regardant par intervalles.

« Tu veux qu’on te regarde ? »

« … — ! »

Quelque chose me frappa la tête, une sorte d’éventail en papier comme ceux dans les
spectacles de farce et attrapes.

« … T’es injuste. »

« Tu fais beaucoup de suppositions bizarres depuis un moment Kimizuka… Et ‘injuste’
c’est un de tes tics de langage ou quoi ? »

« Quand quelqu’un est injuste, je dois le dire. C’est tout. »

C’est pourquoi je le disais pour le première fois en un an. Je n’en avais pas vraiment
envie, tu sais. »

« Très bien, revenons à nos moutons. » Je pris, moi aussi, une gorgée de mon café.
« Cette mystérieuse personne que tu recherches — appelons-la ‘X’. Tu n’as même pas un
petit indice sur X ? »

« Nope. Je ne sais même pas pourquoi je suis si obsédée. C’est juste que … à des
moments aléatoires, je commence à vouloir le voir. Même si je ne sais pas qui il est. »
Natsunagi regarda par la fenêtre.

« Quand est-ce que ça a commencé en gros ? C’est comme ça depuis très longtemps ?
Depuis que tu as commencé le lycée, ou … ? »

« Il y a un an. » Elle semblait vraiment sûre de ça.

Natsunagi disait qu’elle ne connaissait ni le sexe, ni la nationalité, ni l’âge de X, mais
apparemment elle était certaine du moment où elle a commencé à y penser.

« Que s’est-il passé il y a un an ? »

« J’ai failli mourir, mais je ne suis pas morte. Enfin, pour être plus précise, quelqu’un m’a
donné la vie. »

Si elle avait pris la peine de reformuler, c’est que le point est significatif.

Pour une raison quelconque, la vie de Natsunagi avait été en péril, mais ce n’était pas le
langage que l’on utilisait pour décrire une échappée belle. Dans ce cas —

« Le battement de cœur que je t’ai laissé entendre dans la salle de classe, ce n’était pas le
mien. »

« – Une transplantation d’organe, hein ? »

Natsunagi fit un petit signe de tête. « J’ai une maladie cardiaque depuis toute petite. En
attendant le jour d’une potentielle transplantation, je passais mon temps à l’hôpital … Je
ne pouvais même pas aller à l’école. »

« Je vois. Pas étonnant que je ne te connaisse pas. »

« Eh oui. Après tout, tu n’aurais pas pu passer à côté d’une fille aussi adorable. »

« Désolé, j’ai ce gros morceau de cérumen qui me bouche l’oreille depuis hier, donc je
n’entends pas … Ow, ow, ow, ow ! N’attrape pas mon petit doigt ! Arrête de le serrer, tu
vas le casser ! »

« Eh bien, c’est toi qui a cassé la conversation. »

« Cet argument n’a pas de sens ! »

On peut être sadique ou masochiste, pas les deux. Ne sois pas trop gourmande.

Je soupirai, mais Natsunagi m’ignora et continua.

« Puis, il y a un an, ils ont trouvé un donneur compatible et je pus enfin recevoir une
transplantation cardiaque. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à ressentir la
présence de X dans un coin de mon esprit. »

« Tu veux dire que tu cherches déjà depuis un an ? »

« Non. J’ai dû rester alitée pendant un certain temps après l’opération ; même si je voulais
faire quelque chose, je n’aurais pas pu. Mais récemment, j’ai recommencé à aller au
lycée, et j’ai lu des articles sur toi Kimizuka. »

Je vois. Je commençais enfin à avoir une idée de la chronologie et de la forme
approximative des évènements. Nous pourrions être en mesure de résoudre ce problème
beaucoup plus tôt que je ne le pensais.

« Transfert de mémoire, » dis-je.

Natsunagi inclina légèrement la tête. Apparemment, ce concept ne lui était pas familier.

Dans ce cas, le formuler de cette façon pourrait le rendre plus abordable.

« Ce X que tu recherches — c’est quelqu’un que l’ancien propriétaire de ton cœur veut
voir. »

« … C’est la chose la plus folle que j’ai jamais … »

« Si tu le penses vraiment, alors pourquoi tu m’as parlé de ta transplantation cardiaque en
premier ? »

Natsunagi se tut.

« Tu as dit avoir commencé à sentir la présence de X il y a un an. Quand j’ai demandé ce
qui s’était passé à l’époque, tu as dit qu’une transplantation d’organe t’avait sauvé la vie.
Tu viens donc d’admettre toi-même qu’il y a une corrélation entre X et ta transplantation
cardiaque. Ai-je tort ? »

« … T’es un peu con, Kimizuka. »

Natsunagi le lança un regard furieux sous des paupières à moitié baissées. Je suppose
que j’avais raison.

« Le phénomène de transfert de mémoire n’a pas été prouvé scientifiquement, mais il y a
eu de nombreux cas. En 1988, une femme juive nommée Claire Sylvia reçut une greffe
d’organe en Amérique, et quelques jours plus tard, ses habitudes alimentaires changèrent.
Elle développa un goût pour les poivrons, qu’elle n’avait jamais aimé, et pour les fast-
foods, alors qu’elle était une danseuse de ballet qui avait l’habitude de les éviter. Plus tard,
quand elle parla à la famille du donneur, elle apprit que c’était des choses qu’il avait
aimé. »

« Ça peut juste être une coïncidence. »

« Ce n’est pas tout. Dans ses rêves, Claire a vu le prénom de son donneur. Elle demanda
à la famille et c’était bien son nom. Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres … T’en
veux plus ? »

« … T’es un peu con, Kimizuka. »

Ce qu’elle pensait de moi n’avait pas d’importance, si elle était convaincue, c’était bien.

« Et alors ? Ça veut dire que ce cœur est celui qui veut rencontrer X, pas moi ? »

« Probablement. Je suppose que X est un membre de la famille du donneur, un amant ou
un ami … Quelque chose du style. »

« Je vois … » Natsunagi glissa une main sur le côté gauche de sa poitrine tout en se
mordillant la lèvre.

« Eh bien, voilà : Félicitations. Problème résolu. »

Je l’ai aidée jusqu’ici. Elle peut bien me payer un café.

Je me levai en pensant cela, laissant l’addition, mais …

« Hein ? Où est-ce que tu crois aller ? » Natsunagi me fixait dangereusement. « Si tu dis
que tu pars maintenant, je te tue deux fois. »

« C’est très … original. Bon sang, d’accord. » Débarrassé de son hostilité, je me rassis à
contrecœur sur ma chaise. « Je pensais que la conversation était terminée. »

« Qu’est-ce qui t’as donné cette idée ? Tu ne regardais pas une fille qui avait mis sa main
sur sa poitrine en se mordillant la lèvre d’un air désespéré ? »

« Je pensais que tu te laissais aller à un épilogue sentimental. »

« Tu n’as pas de sentiments humains, c’est ça ? »

Des sentiments humains ? Nah, je les ai jetés dans une ruelle quelque part il y a un an.
« Pense ce que tu veux. Natsunagi, comme je l’ai dit, c’est le propriétaire du cœur qui veut
rencontrer X, pas toi. C’est juste un souvenir de l’époque où ils étaient vivants. Ça n’a rien
à voir avec toi. »

« Tu te trompes ! » Natsunagi frappa la table et se leva. « C’est faux. Ce n’est pas
seulement un souvenir — c’est un regret. Même si son corps est mort, il m’a laissé hériter
de son cœur. C’est dire à quel point il veut rencontrer X. Ce cœur m’a donné la vie, et je
veux lui rendre la pareille. C’est le moins que je puisse faire. Je veux aider ce cœur à
retrouver la personne qu’il cherche. »

La façon dont elle parlait avait changé par rapport à auparavant. C’était la preuve qu’elle
disait ce qu’elle ressentait vraiment, contrainte par ses émotions.

« Donc tout ça, c’est vraiment pour toi. »

« Bien sûr, je le fais pour moi. Ce cœur est à moi. Ça veut dire que c’est moi qui veux voir
X. »

« Ce n’est pas ce que tu disais juste avant. »

« … Ferme la et aide moi. »

Une lingette humide vola au-dessus de la table, me frappa au visage et s’y accrocha.
C’était, en effet, humide et vraiment dégoûtant.

« Je suppose que tu vas me dédommager ? »

Lorsque je retirai le tissu humide, mes yeux rencontrèrent ceux de Natsunagi, qui était
grognons.

« Je t’ai payé en avance en te laissant toucher ma poitrine, tu te souviens ? »

« Extorsion classique. »

« Si ça ne te suffit pas, j’expose tes habitudes bizarres à tous les élèves du lycée. »

« Et comme je l’ai dit, je pourrais certainement faire la même chose. »

« Ngh … Écoute, tu crois vraiment que je suis ce genre de personne ? »

« Si tu veux des conseils, tu t’y prends littéralement de la pire des manières. »

Blague à part …

« Eh bien, j’ai dit que je le ferais. »

J’avais déjà accepté, et je ne pouvais pas vraiment revenir sur ma parole.

« Quoi qu’il arrive, les intérêts du client doivent être protégés. »

C’était quelque chose qu’elle avait l’habitude de me dire, encore et encore.

« Très bien, alors, demain. On se retrouve devant la gare à deux heures de l’après-midi. »

« Hein ? Demain ? »

« Oui. Il est déjà tard aujourd’hui. »

N’ayant pas le choix, je pris l’addition et me levai, me préparant à partir.

« Tu veux voir X, hein ? »

◆Ce n’est pas un rendez-vous, évidemment …

« Désolé de t’avoir fait attendre. »

C’était le week-end, je me tenais à l’ombre d’un pilier sur la place de la gare, vérifiant ma
montre, quand quelque chose me frappa légèrement l’épaule.

Quand je me retournai, je vis Natsunagi, habillée en vêtements de ville et portant un petit
sac à main.

Son chemiser sans manches exposait généreusement ses clavicules blanches, et son
short en jean mettait en valeur ses longues jambes fines. C’était comme si elle s’était
habillée pour « l’été » qui faisait partie de son nom.

« Tu peux arrêter de lorgner sur une camarade de classe qui n’est même pas ta petite
amie ? »

« Pas sûre que je veuille entendre ça de la part de quelqu’un qui a poussé ses seins
contre un camarade de classe qui n’est même pas son petit ami. »

« Tu as aimé ça pourtant. »

« … »

Merde. Elle m’a eu là.

« Bref. Natsunagi tu as dix minutes de retard. Sois ponctuelle. » Comme je ne pouvais pas
nier son accusation, je changeai de sujet.

« Les filles ont besoin de temps pour se préparer., peu importe ce qu’elle font. » Natsunagi
fit la moue, il y avait du rouge à lèvre vif sur ces lèvres.

Je vois ; c’est vrai. Elle avait l’air 30 % plus adulte que la veille.

« C’est comme ça ? Désolé. »

« Tu es terriblement coopératif maintenant. »

« Eh bien, j’apprécie avoir une jolie fille à côté de moi. »

« … Hmph. Ça ne me dérange pas d’entendre ça, » murmura Natsunagi en me regardant
à travers ses cils.

« … Quoi ? »

« Rien … »

« Allez, quoi ?! »

« Rien. »

Non sérieusement, c’est quoi ce bordel ?

Je baissai les yeux vers Natsunagi dont la position rendait ses seins impossibles à
manquer.

«  … Tu apprécies la vue ? » Natsunagi me regarda froidement en mettant ses bras autour
de sa taille. Les rôles étaient inversés.

« Non, pas tes seins. J’étais juste entrain d’observer tes clavicules. »

« Beurk ! Regarde au moins mes seins, comme une personne normale ! »

« Tu as une belle paire pour quelqu’un de ton âge. »

« Qu’est-ce que l’âge a à voir avec des clavicules ?! Pourquoi tu parles comme un critique
de clavicules ?! … Qu’est-ce qu’un critique de clavicules de toute façon ?! »

« … Hmmm. Avons-nous déjà eu une conversation de ce genre ? » demandai-je.

« J’espère bien que non, une fois est déjà bien assez suffisante. » Harassée, Natsunagi
pressa une main contre son front. « … Hey, depuis quand je suis le personnage qui fait
tous les comebacks. »

« C’est bien de changer les rôles de temps en temps. » Pour être honnête, ce n’est pas
comme si je voulais ce rôle non plus. « Okay, on devrait y aller. » Je tapai l’épaule de
Natsunagi et partis en prenant la tête.

« Où est-ce que tu vas. Écoute, ils vont t’arrêté si tu ne t’habilles pas. »

« Hey, si tu veux récupérer le rôle de l’humoriste, il te faut plus de préparation. »

… Quand même, c’est bizarre.

Bizarrement, quand Natsunagi plaisante avec moi, ça fait vibrer une corde sensible.

Après avoir marché pendant une dizaine de minutes, nous vîmes notre destination.

« Um, Kimizuka ? Je suis presque sûre de me tromper, mais c’est là qu’on va ? »

« Nous somme à la recherche de quelqu’un. Donc ce n’est pas si bizarre. »

Malgré cela, Natsunagi fronça les sourcils, peu convaincue. « Tu as l’intention de leur faire
chercher X ? »

« Non on prépare le terrain. Si tu veux tuer le général, commence par t’occuper de son
cheval. »

« Le général est X … Donc le cheval est … le cœur ? »

« Exact. D’abord, nous allons enquêter sur celui qui t’a donné la vie. »

Ce « X » que Natsunagi recherchait devait être proche de l’ancien propriétaire du cœur.

Dans ce cas, il fallait d’abord déterminer l’identité du donneur.

« Ne devrions-nous pas aller à l’hôpital ? »

« J’aimerais bien, mais malheureusement, je n’ai pas de connaissances dans le domaine
du médical. »

« … Cela signifie que tu connais quelqu’un ici. »

« Eh bien, ne sois pas si tendue. Allez, on y va. »

Et c’est ainsi que nous entrâmes dans l’imposant gratte-ciel qui abritait le Département de
la Police Métropolitaine.

◆Exploser le crâne

« Hey, ça fait un bail sale gamin. T’as finalement décidé de te rendre ? »

Une femme entra dans la pièce où nous attendions, et se laissa lourdement tomber sur la
canapé en face de Natsunagi, en allongeant ses jambes d’une manière paresseuse.

« Mme Fuubi, je ne suis pas sûr que les femmes devraient s’asseoir avec les jambes
écartées comme ça. »

« Va te faire voir. Le genre n’a rien à voir avec le fait de s’en sortir ici. » Tout en parlant,
elle alluma un gros cigare.

On pouvait décrire son visage comme frappant — ou comme flashy — elle portait un
uniforme d’une manière très décontractée. Ses cheveux roux flamboyants étaient tirés en
arrière, dans une queue de cheval désordonnée.

Personne en l’aurait cru en la voyant pour la première fois, mais Fuubi Kase était
inspectrice de police.

Compte tenu du fait qu’elle était flic de quartier lorsque je l’ai rencontrée pour la première
fois il y a cinq ou six ans, pour quelqu’un qui avait (probablement) une vingtaine d’années,
elle semblait faire de bons progrès dans sa carrière.

« Alors, quelle carte tu as tiré cette fois ? Vol ? Meurtre ? »

« Je n’ai rien fait. En fait, j’ai récemment eu des éloges pour avoir attrapé un autre
cambrioleur. »

« Tu es le premier sur la scène de crime dans ce district dans soixante-dix pourcent des
cas. Tu ne peux pas nous reprocher de te soupçonner de les avoir mis en scène. »

« C’est juste arrivé. C’est comme ça que je suis branché »

Ma malchance avec Mme Fuubi a commencé quand elle est devenue officier de police et
a commencé à se montrer sur les scènes de crime.

J’ai dû lui laisser l’impression d’être un gamin louche traînant toujours autour des scènes
de crime. J’aimerais vraiment dissiper ce malentendu, mais elle semble toujours penser
que je suis suspect.

« C’est vrai, hein ? Et tu t’es branché sur une vraie détective ? »

« … Aucune idée. J’ai plutôt l’impression qu’elle m’a attiré à elle, qu’elle m’a enroulé
autour de son petit doigt, puis qu’elle est partie toute seule, quelque part au loin. »

C’est bien ça : Extrêmement loin. Un endroit qu’on ne pouvait trouver sur aucune carte, un
endroit lointain inaccessible —

« Hah ! Eh bien, c’est vrai. » Souriant légèrement, Mme Fuubi émit un rire rauque. « Et toi,
qu’en est-il de toi ? Tu travailles en solo maintenant ? »

« … Non, il n’y a rien que je puisse faire seul. » D’ailleurs, on dirait que je ne suis même
pas sur leur radar ; les choses ont été si paisibles que c’en est effrayant.

« Eh bien, merde. Tu es plutôt sans cœur. Les morts ne racontent pas d’histoires hein ? »

Je n’avais pas l’intention d’en dire autant. Après tout, elle me hanterait probablement pour
ça.

« Ow ! »

A ce moment là, une douleur aiguë traversa mon pied. Quand je regardai en bas, je vis
que la basket de Natsunagi me le piétinait.

« C’était pour quoi ça ? »

« Hein ? Oh, hum juste pour … des raisons ? Et hé, ne m’excluez pas comme ça. »

Ne piétine pas un gars pour « … des raisons ? » Sérieusement.

« Uh, donc, Mme Fuubi. Pour en venir aux choses sérieuses, je voulais vous parler de
cette fille, mon amie … »

« Ta petite-amie ? »

« Non, c’est pourquoi je n’ai pas dit ‘petite’ »

Les yeux de Mme Fuubi se dirigèrent vers Natsunagi, assise à côté de moi.

« C’est un plaisir de vous rencontrer. Mon nom est Nagisa Natsunagi. Je suis ici à la
demande de M. Kimizuka. »

« M. Kimizuka » … Ça sonne différemment.

Et hey, Natsunagi peut se comporter poliment en public, hein ?

« Donc, vous voulez juste ‘parler’ avec moi et vous ‘présenter’ ? Bien. Je vous écoute.
Brièvement. » dit Mme Fuubi en allumant son second cigare.

Quelques minutes plus tard …

« Je vois. »

Quand nous finîmes notre histoire, Mme Fuubi expira une dernière longue bouffée de
fumée, puis jeta le mégot dans le cendrier.

« Je comprends ce qui se passe… Mais pourquoi êtes-vous venus ici ? » Rétrécissant
encore plus ses yeux déjà aiguisés, elle nous lança un regard noir. « Vous voulez que l’on
cherche la personne qui a donné son cœur ? Vous savez que nous ne sommes pas
médecin, n’est-ce pas ? »

« Trouver des gens est techniquement le travail de la police. »

« Pas de trouver des donneurs d’organes. »

Visiblement irritée, Mme Fuubi croisa ses jambes.

« Voilà, qu’est-ce que je t’avais dit ? Ce n’est pas le bon endroit, » chuchota Natsunagi en
me donnant un coup de coude. Eh bien, attends une minute.

« Les organisations policières ne sont pas complètement déconnectées de ces incidents.
En fait, si la police n’est pas présente, elle ne peut même pas déclarer un donneur
potentiel en état de mort cérébrale. »

Selon la loi, tous les cas dans lesquels la mort cérébrale est décrétée doivent être signalés
à la Première Division d’enquête du Bureau des Affaires Criminelles de l’Agence Nationale
de Police. Les autopsies sont également effectuées sous la supervision et la direction du
chef du poste de police de chaque juridiction. Cela signifie que, lorsque j’ai choisi de venir
ici, je n’étais pas si loin de la vérité. Et d’ailleurs —

« Je ne suis pas venu voir la police. Je suis venu te voir. »

Pas n’importe qui ferait l’affaire. C’était le genre de choses que je pouvais demander parce
que c’était Mme Fuubi.

« Et qu’est-ce que ça vous apporte ? »

« Mme Fuubi, vous n’êtes pas un policier comme les autres. »

« Je ne suis pas comme eux ? Comment ça ? »

« Votre résolution. »

Ou peut-être, serait-il préférable de dire ses objectifs.

Cette femme n’est pas comme les officiers qui veulent du pouvoir et de l’argent. C’est
pourquoi – et je le dis de la façon la plus gentille possible – elle n’est pas vraiment tenue
par le bon sens. »

« Il est hors de question que je divulgue les informations personnelles d’un donateur à un
citoyen lambda. »

« Je sais. »

« De plus, je suis dans une autre juridiction, et ma position ne m’autorise pas à divulguer
des informations. »

« Je le sais aussi. »

« Alors, pourquoi es-tu venu me voir ? »

« Parce que je me suis dit que tu te débrouillerais de toute façon. Puisque c’est toi. »

« … Qu’est-ce qui ne tourne pas rond dans ta tête ? »

L’air un peu gênée, Mme Fuubi passa ses doigts grossièrement dans ses cheveux roux.
« Écoute, tu sais déjà que je vise le sommet. Cela signifie que je ne veux pas prendre de
risques qui pourraient me faire trébucher. »

« Ha-ha. C’est un peu trop tard pour prétendre que tu as du bon sens, tu en crois pas ? »

Elle pointa son arme sur mon front.

« … Hum, je suis presque sûr que ça compte comme un risque. »

Je veux dire, regarde. Même Natsuangi est tendue.

« Eh bien, c’est comme ça. Désolé mon cœur, mais rentre chez toi d’accord ? » Rangeant
son arme, Mme Fuubi s’étira.

« Non … s’il te plaît. Peu importe ce qu’il faut, je … »

« Tu peux demander aussi gentiment que tu veux, mais je ne peux pas tout faire. » Sur ce,
elle se leva en faisant rouler ses épaules. « De plus, je suis occupée. Je dois m’arrêter à
la Grande Maison après ça. »

La Grande Maison ? … Oh. Je comprends maintenant.

Natsunagi semblait confuse, mais les explications allaient attendre. « Tu vas rencontrer
quelqu’un ? »

Mme Fuubi s’arrêta ; une main sur la porte. « Quelqu’un que tu connais très bien. Donc
vous savez, si vous avez l’intention de me suivre, nous nous trouvons dans un pays
libre. »

Bingo hein ? Bon sang, elle est le contraire de directe.

« Juste pour le dossier, laisse moi te demande. Cette personne a-t-elle de bonnes
oreilles ? »

A ce moment-là, Mme Fuubi se retourna.

« Oui. Il n’oublie jamais le son d’un cœur une fois qu’il l’a entendu. »

◆Non, pas ce genre d’euphémisme

Après les quinze minutes de route entre le Département de Police Métropolitaine et la
Grande Maison, nous suivîmes Mme Fuubi à travers une sécurité renforcée, puis nous
nous dirigeâmes vers les plus bas étages du sous-sol.

Nous descendîmes les escaliers, puis d’autres encore. Au fur et à mesure, le nombre de
lumières diminuait, et nos pas résonnaient davantage.

« Vous avez seulement jusqu’à ce que je finisse mon travail à l’étage. J’en ai pour environ
vingt minutes. Vous pouvez vous y tenir ? » Mme Fuubi nous posa cette question par-
dessus son épaule.

« Bien sûr. »

Même si elle nous avait repoussés en prétendant ne pas se soucier de ce que l’on faisait,
elle nous montrait le chemin, ce qui la faisait passer de « pas franche » à « beaucoup trop
gentille ». Je veux dire, elle nous a même fait venir ici dans une voiture de police.

« Tu ne vas pas le voir Mme Fuubi ? »

« Ha. Peu importe ce que je dis, il ne parlera pas. C’est une perte de temps. »

« S’il te donne du fil à retordre, il doit vraiment être spécial. »

« Comme si tu n’avais rien à voir avec lui. C’est toi qui l’a amené ici. »

« Je ne sais rien de tout cela. Dis-le à la défunte détective. »

« N’utilise pas ta partenaire comme excuse. » dit Mme Fuubi en me donnant une petite
tape sur la tête. « Voilà, nous y sommes. »

L’air de cet étage était encore plus stagnant que le reste de l’intérieur sombre. L’odeur de
moisissure me fit presque froncer le nez.

« Vingt minutes, tu m’entends ? Tu n’en auras pas plus. Toi non plus ma chérie ;
compris ? »

Sur ce dernier avertissement, Mme Fuubi leva la main, puis commença à remonter les
escaliers que nous venions de descendre.

Ceux qu’elle laissa derrière étaient moi et —

« … Um, Kimizuka. J’aurais probablement dû demander plus tôt, mais n’allons-nous pas
vers la maison de quelqu’un ? »

— Natsunagi qui regardait autour d’elle avec un peu d’agitation.

« Ouais c’est la Maison, Natsunagi. »

« Où exactement ? »

Où ? Si je devais le dire, eh bien …

« Je veux dire, c’est une prison. »

« J’ai remarqué, je demande pourquoi ! » Elle me tira l’oreille sans ménagement.
Apparemment elle ne faisait l’innocente qu’en public. « Je visualisais un endroit dans le
style d’une cabane en rondins, et maintenant nous sommes ici dans tout de béton, avec
toutes ces barres de fer partout. »

« Mm-hmm. Parce que c’est une prison. »

« Qu’est-il arrivé à la maison ? »

« C’est un euphémisme. »

« U-un euphémisme ? »

« … Maintenant écoute … »

Pourquoi avait-elle l’air un peu excitée ? Elle est exactement ce que je pense qu’elle est.

« C’est un terme argotique pour ‘prison’. Parfois ils l’appellent ‘la Grande Maison’ à la
place. C’est de la notoriété publique. »

« De la notoriété publique pour qui ? »

« C’en est si tu as voyagé dans un avion, avec des attachés-cases remplis d’objets
inconnus depuis que tu es au collège. »

« J’espère que je ne connaîtrais jamais quelqu’un comme ça. »

T’es à côté de l’un d’eux en ce moment.

« Alors ? Pourquoi on est là ? »

Natsunagi semblait s’habituer à cet endroit. Elle regardait autour d’elle, essayant de percer
les barreaux de fer.

« Pas là-bas. Elle a dit que celui pour lequel nous sommes ici est tout au bout. » Je pris
les devants, marchant devant Natsunagi

« Qui est là ? »

« Un vieux type. »

« Sois sérieux. »

« Un vieux type qui a renoncé à être humain. »

« Eh bien, vu comment il est ici, il pourrait aussi bien avoir renoncé à son humanité, mais
… »

« Non, ce n’est pas ce que je voulais dire. » C’était un fait extrêmement grave et
irréversible. « L’homme que nous allons rencontrer n’est littéralement pas humain. »

Disons que cette routine quotidienne, la mienne — la notre — et toutes ces petites choses
qui ne font pas partie de notre routine se trouve être une histoire. Si des gens espéraient
que ce soit une véritable histoire de mystère, j’aimerais profiter  de l’occasion pour
m’excuser. Je ne pense pas que cette histoire soit ce qu’ils recherchent.

« Kimizuka, cet homme … » Natsunagi attrapa le bord de ma manche avec hésitation.

Au fond du sous-sol, il y avait une petite pièce en acier complètement fermée. Lorsque
nous regardâmes à travers l’unique fenêtre – une petite plaque de verre dans la porte –
nous vîmes un homme assis avec des chaînes enroulées autour de ses bras.

Après une pause, la porte à volets s’ouvrit avec un grincement sourd.

« Hé, ça fait un bail – Chauve-Souris. »

Au son de ma voix, l’homme tressaillit. Il y avait de la barbe sur son menton, et des
cheveux blonds étaient en désordre. Enfin, son visage se tourna lentement vers nous.

« Maintenant, il y a un son qui fait remonter des souvenirs – brillant détective. »

◆Cœur, Chauve-Souris et pseudo-humain

Je connaissais ce taulard en particulier.

Son nom – son alias – était Chauve-Souris. Je ne voulais plus jamais revoir ce type.

Mais comme l’avait laissé entendre Mme Fuubi, il pouvait être en mesure de résoudre le
problème de Natsunagi. Me rappelant qu’il s’agissait d’un travail, je fis face à Chauve-
Souris.

« Malheureusement, je ne suis pas un brillant détective. »

Désolé, mais les seules personnes ici sont l’assistant et un client ;

« Hmmm ? … Oh, tu es — Ouais, je vois. Watson, hein ? »

Il me lança un regard noir, puis la commissure de ses lèvres se releva légèrement.

« Ton japonais est toujours aussi bon. »

« Ha-ha ! C’est une compétence essentielle pour un type comme moi. En plus, ça fait des
années que je vis ici, j’ai oublié ma langue maternelle. »

Je suis presque sûr qu’il était originaire d’Europe du Nord. Cependant, ses yeux
émeraudes étaient troubles et ternes maintenant.

« Tes yeux fonctionnent encore ? »

« Nah, ils sont inutiles à ce stade. Mais ça n’a pas vraiment d’importance pour moi d’en
avoir ou non. »

« J’ai entendu dire que ça importait à la plupart des gens. »

« On a les mêmes yeux maintenant, Watson. Ceux d’un poisson mort. »

« C’est la pire nouvelle du siècle. Aussi, j’apprécierais que tu en m’appelles pas comme
cela. »

« Ha-ha ! Quoi, tu as fini de jouer à l’assistant ? »

… Eh bien, c’était le plan de toute façon. « Je suis ici parce que je veux te parler Chauve-
Souris. »

« Huh. Je l’aurais parié. A moins de circonstances exceptionnelles, vous ne seriez jamais
venu me voir tous les deux. »

Tous les deux hein ? C’est vrai, quand j’ai rencontré ce type, je n’étais pas seul.

C’était il y a longtemps cependant.

« Bien sûr, vas-y, parle. La vie ici est chiante à mourir. C’est un bon moyen de tuer le
temps. » Avec un soupçon de vie dans sa voix, Chauve-Souris m’encouragea à continuer.

« Je vois. Dans ce cas, je vais vous la présenter toute de suite. La fille à côté de moi est
Nagisa Natsunagi ; c’est une de mes camarades de classe. »

« Nagisa … Natsunagi ? » À ce moment, Chauve-Souris bougea légèrement la tête,
tournant ses yeux troubles vers la fille à côté de moi.

« … C’est un plaisir de vous rencontrer. Je m’appelle Natsunagi. »

Elle tressaillit brièvement, mais elle reprit promptement son expression habituelle, faisant
carrément face au prisonnier en face d’elle.

« Je suis venue aujourd’hui parce que je voulais vous parler de mon cœur. »

Quelques minutes plus tard …

« Je vois ; c’était donc ça. Pas étonnant. »

Lorsque Natsunagi eut fini de lui parler de son problème, Chauve-Souris fit craquer sa
nuque de manière audible.

« Pour faire court, vous êtes venue me demander si j’ai une idée de l’identité du
propriétaire de ce cœur. »

« Oui, c’est vrai … Mais … » Natsunagi se pencha vers moi pour me chuchoter à l’oreille.
« Peut-il vraiment dire quelque chose comme ça ? »

Ah, oui. En y réfléchissant, je n’ai pas encore parlé de ça à Natsunagi.

« Euh, donc, il est … »

« Hey, c’était assez grossier mon cœur. »

« Ack ! Il nous a entendu. » Natsunagi regarda au loin, embarrassée.

Bien sûr qu’il a entendu. Après tout —

« Ha-ha ! À cette distance je n’ai même pas besoin d’essayer. Si j’en ai envie, je peux
entendre des gens parler à 100 km à la ronde. »

C’est de là que « Chauve-Souris » tenait son nom de code.

Ce type n’était pas humain. Il faisait partie du groupe que ma partenaire avait combattu
jusqu’à la mort : Un pseudo-humain.

« Eh bien, j’ai perdu la vue en échange. De plus, mes oreilles phénoménales ne sont
d’aucune utilité ici. Tant que la porte de la cellule est fermée, cette salle est insonorisée. Je
me demande si c’est à ça que ressemblent les morts-vivants ? Ha-ha ! » La blague de
Chauve-Souris, à ses propres dépens, n’était pas très drôle. « Maintenant que je peux
utiliser mes oreilles, capter le son de ton cœur est un jeu d’enfant pour moi. »

« C’est fou .. »

« Certaines choses le sont, tu sais. Le monde est vaste. » Chauve-Souris sourit à
Natsunagi.

Cela semblait être un bon argument, mais ce ne l’était pas. Il était toujours aussi doué
pour vous faire perdre la tête quand vous lui parliez. C’est sans doute pour ça que Mme
Fuubi a insisté pour que notre visite soit limitée dans le temps.

« … Disons que je vous crois. Que comptez-vous faire après avoir écouté mon cœur ? »

Bien qu’elle soit encore méfiante, Natsunagi incita Chauve-Souris à poursuivre.

« J’ai une base de donnée de cœurs de toutes les personnes que j’ai rencontrées au
cours des dernières années décennies. Je vais le comparer à cette base et voir si je
trouve des correspondances. »

« C’est la chose la plus folle que j’aie jamais — ! Et quelles sont les chances que vous
ayez rencontré par hasard le propriétaire de ce cœur avant … ? »

« Non Natsunagi. Il est peut-être prudent d’espérer un peu plus. »

« Kimizuka ? Qu’est-ce que tu veux dire ? »

Après tout, ce type n’avait pas une carrière ordinaire. C’était un pseudo-humain qui volait
dans le monde entier, en suivant des ordres.

Il est possibles qu’il ait rencontré le propriétaire du cœur de Natsunagi de son vivant. Et,
en utilisant ses oreilles augmentées, avec son ouïe extrêmement fine, il pouvait même
distinguer les différents battements de cœur. C’est une capacité qu’il a vraiment.

« Je n’essayais pas de te le cacher Natsunagi, mais je connais bien cet homme. Je l’ai
rencontré pour la première fois il y a quatre ans, au-dessus des nuages, à dix mille
mètres. »

C’est exact. C’était ce jour-là — le jour où j’ai rencontré la brillante détective.

Ce type était un passager de l’avion.

« Ha-ha, ça fait déjà quatre ans ? Ça me ramène en arrière … Hé, pourquoi ne pas
évoquer le passé ? » Les yeux de Chauve-Souris brillèrent légèrement.

« Désolé, mais nous n’avons pas tout notre temps. Mme Fuubi nous a donné une fenêtre
de visite fixe. »

« Oh, la nana avec un cul aussi gros que son attitude ? Eh, ça va aller. Et si je vous
donnais quelques informations sur nous après ? Vous seriez en mesure de la mettre de
bonne humeur de cette façon. »

« Qu’est-ce que tu essaies de faire Chauve-Souris ? »

Je sais qu’on dit qu’à cheval donné, on ne regarde pas les dents, mais il était bien trop
coopératif. Même si le badinage faisait partie de notre relation, Chauve-Souris et moi
n’étions définitivement pas dans la même équipe.

« Je n’essaie pas de tirer quoi que ce soit. Ça fait juste longtemps que je n’ai pas eu
d’invités, alors je suis de meilleure humeur que d’habitude. »

Et je suis censé croire ça ?

… Tout de même, si on le met de mauvaise humeur, on pourrait finir par gâcher notre
indice durement gagné.

« Désolé Natsunagi, ça va prendre un peu de temps. »

Bon sang. Si c’est comme ça, on ne peut qu’aller de l’avant.

Je repensai à ce qui s’était passé ce jour-là, il y a quatre ans.

◆Y a-t-il un détective à bord ?

« Qu’est-ce que je fais par une si belle journée ?! »

Le temps n’avait pas grand-chose à voir avec quoi que ce soit, mais … alors que je
regardais par la fenêtre les nuages, à dix mille mètres d’altitude, en deuxième année de
collège, je ne pouvais que maudire mon propre destin.

La source de mes inquiétudes était entreposée dans le compartiment à bagages au-
dessus de mon siège. Mais je ne savais pas ce qui allait m’arriver si je refusais la
demande de ces hommes en noir.

Mec, si ce n’est de la malchance, alors qu’est-ce que c’est ?

Alors que je me lamentais sur mon propre sort, j’entendis la phrase qui allait changer ma
vie.

« Y a-t-il un détective à bord ? »

Au début, je pensais avoir mal entendu.

Mais après la deuxième fois, j’acceptai la réalité : Une situation nécessitant un détective
se déroulait dans cet avion.

Je vais être honnête avec vous cependant. Ce n’était pas la première fois que je
rencontrais ce genre de problème mystérieux. Je ne plaisantais pas quand je disais que
les problèmes sérieux semblaient toujours me trouver.

Cela étant, je pensais que je serais probablement capable d’esquiver et de louvoyer pour
m’en sortir. Si je fermais les yeux, la tempête se dissiperait avant que je ne m’en rende
compte.

Naïf, je sais. Je l’admets.

Cependant, ce qui était différent cette foi-ci …

Ce qui m’a fait ouvrir les yeux, c’est …

… avant tout, le fait qu’elle était dans le siège à côté du mien.

« Oui, je suis une détective. »

C’est ainsi que nous nous rencontrâmes : moi, Kimihiko Kimizuka et elle, Siesta.

La couleur de ses cheveux rendait improbable son origine japonaise, et ses traits
symétriques étaient aussi délicats que du verre filé. Le design unique de sa robe me
rappelait un uniforme militaire d’un autre pays. L’ensemble de ces éléments lui conférait
une beauté pratiquement irréelle.

Cette fille miraculeuse était juste à côté de moi, et jusqu’à ce moment précis, je n’avais
même pas remarqué son existence. Je n’arrivais pas à y croire  — et j’oubliai tout, même
la situation dans laquelle je me trouvais.

« Quel est ton nom … ? »

Cependant, c’était une rencontre fatidique d’un autre genre.

« Un timing parfait. Sois mon assistant. »

« Huh ? »

A peine avait-elle parlé que la fille attrapa ma main et se leva.

« Par ici, s’il vous plaît ! »

« On arrive tout de suite. »

La fille suivit le chef de cabine … et comme elle me tirait par la main, je la suivis. Sous les
regards ébahis et bouche bée des autres passagers, notre étrange procession avançait.

C’est quoi ? Qu’est-ce qu’il se passe ?

… Oh, c’est vrai. Une détective, hein ?

La présence vivante de la fille l’avait déjà presque effacé de ma mémoire – actuellement,
quelque chose se passait dans cet avion, et ils avaient besoin d’un détective pour
résoudre l’affaire. Et elle m’avait appelé … son assistant ?

Cette belle fille qui me tenait par la main était une détective, et j’étais son assistant.

Je suis né comme un aimant à situations inhabituelles et j’ai passé la dernière douzaine
d’années à survivre à toutes sortes d’ennuis, et même moi, j’avais beaucoup de mal à
suivre cette évolution.

La fille ne remarqua pas ma confusion et dit, « Siesta. » Juste un mot, et elle ne se
retourna même pas en le disant. « C’est mon nom. »

« … Plutôt bizarre, » je réussis finalement à dire.

« C’est un nom de code. »

« Un nom de code ? »

« Les gens en ont un, en général. »

« Non, en général, ils n’en ont pas. » Ils n’en ont pas, hein ? Habituellement ?

« Alors, quel est ton nom ? »

« Kimihiko … Kimizuka. »

« Je vois. Je vais t’appeler ‘Kimi’ alors. »

« … C’est un surnom ? »

Lorsque je lui posai cette question, pour la première fois, Siesta se retourna vers moi.

« Bonne question. Qu’est-ce que tu crois que c’est ? »

Le sourire qu’elle m’adressa était adorable à cent millions de watts.

Mais ce n’était pas le temps de faire de la comédie romantique.

« J’ai amené une détective et son assistant. »

Mon titre se répand beaucoup trop vite …

Je n’eus même pas le temps de sortir une réplique car la situation évoluait toujours.

Lorsque le préposé frappa à la porte, j’entendis un bip électronique, suivi du déblocage
d’une serrure, puis la lourde porte s’ouvrit.

« Putain de … » Je ne pouvais pas en croire mes yeux.

Deux hommes, le pilote et le copilote, étaient assis sur les sièges du cockpit exigu.

Le plus âgé — probablement le pilote — tenait le manche, le visage cendré. Le plus jeune,
le copilote, était plié en deux et inconscient, tandis qu’un autre homme était assis sur lui,
les jambes croisées.

« Hé, vous avez vraiment trouvé un détective ? »

L’homme avait des cheveux blonds frappants et des yeux émeraudes.

Il parlait japonais, mais ses traits et la couleur de sa peau laissaient penser qu’il venait
d’Europe du Nord.

De sa place, sur le dessus du corps du copilote, l’homme jeta un regard froid de mon
visage à celui de Siesta et inversement.

« Vous êtes plus jeune que ce à quoi je m’attendais, mais peu importe. Alors. Lequel est
censé être le détective ? » a-t-il demandé d’un air moqueur.

Essayait-il de nous intimider, de garder l’avantage autant qu’il le pouvait ?

Il n’en avait guère besoin, pourtant ; nous étions déjà dans la merde. Même moi, je n’étais
jamais tombé sur un pirate de l’air, et mes genoux faiblirent malgré mes tentatives pour les
maintenir stables.

« Tout d’abord, quel est ton nom ? » demanda Siesta.

Le pilote était toujours pâle, le copilote était toujours inconscient et l’hôtesse de l’air était
tellement en sueur que son maquillage coulait, mais elle était la seule personne qui n’avait

pas gelé sur place. Ignorant les adultes incapables, cette adolescente barrait la route au
pirate de l’air, toute seule.

« Chauve-Souris. C’est un nom de code, » dit l’homme.

Siesta se tourna vers moi. « Voilà, tu vois ? Tout le monde à un nom de code. »

« Écoute, je m’en fous. »

C’était le moindre de mes problèmes actuellement ! Ce n’était vraiment pas le moment !

Pour une quelconque raison, Siesta avait l’air un peu fière d’elle, mais je l’obligea à se
tourner à nouveau vers l’avant, vers Chauve-Souris le pirate de l’air.

« Je suis Siesta, et voici mon assistant Watson. Nous avons grandi ensemble sur Baker
Street. » Elle mentit comme si de rien n’était. Ses nerfs étaient bien trop solides. « Eh
bien, Chauve-Souris ? Qu’essayez-vous de faire ? Pourquoi m’avoir fait venir, moi la
brillante détective ? »

Oh, c’est vrai. Ouais.

Grâce à l’attitude insouciante de Siesta, j’avais presque oublié la situation.
« Ha-ha, ha-ha ! T’es drôle toi. J’aime ça ; ça pourrait être amusant. »

Chauve-Souris rit, puis parla de où il était assis.

« Découvrez pourquoi j’ai détourné cet avion. Si vous y arrivez, je ne briserai pas le cou
du pilote. »

A cet instant — la vie de six cents passagers et membres d’équipages fut confiée à
l’habileté d’une seule détective.

◆Pirate de l’air vs. brillante détective

« La raison pour laquelle tu as détourné cet avion ? »

Siesta fit l’écho de ses paroles en posant un doigt sur son menton délicat.

« Tu m’as fait venir juste pour me faire déduire ça ? »

« Oui, c’est ça. Je voulais jouer à un petit jeu. Un jeu à gros enjeux avec la vie de six cents
passagers dans la balance … Ça a l’air amusant ? » Chauve-Souris sourit, laissant son
regard se promener sur nous. Le simple fait de regarder ce type me rendait malade. « Tout
ce que vous avez à faire pour gagner, c’est deviner pourquoi j’ai détourné l’avion. C’est
tout. »

« En d’autres termes, si on devine correctement, la vie de tout le monde sera épargnée, et
si on se trompe, ils mourront ? »

« Exact. Agréable et simple. »

« Oui, ça l’est. Mais si nous échouons, tu subiras le même sort que nous. » Siesta fixa
Chauve-Souris avec des yeux perçants.

« … C’est vrai. Si je suis dans un avion qui va s’écraser, je n’ai aucun moyen de me
sauver. »

« Ce qui veut dire que tu ne tiens pas à la vie ? »

« Si je ne m’éclate pas d’une manière ou d’une autre, je n’ai pas l’impression d’être
vraiment en vie ; et cetera, et cetera. »

« Je vois. Tu dois terriblement t’ennuyer. »

Siesta était étonnamment intrépide lorsqu’elle parlait avec le pirate de l’air. On avait
l’impression qu’il y avait des lames invisibles cachées dans leur échange de plaisanteries.

Cette bataille était-elle sur le point de s’intensifier… ?

« Oui, je m’ennuie. L’ennui est devenu si fort que je suis allé détourner un vol dans un
pays étranger. »

« Très bien, alors c’est tout. »

Cependant, l’instant d’après …

« Tu as détourné l’avion parce que tu t’ennuyais désespéramment. »

— elle donna sa réponse finale.

Sans même téléphoner à un ami, Siesta joua son jeu.

« … Siesta, attends, attends juste une seconde. T’es sérieuse ? »

Son motif était — l’ennui ?

Ça ne peut pas être vrai. Ils ont juste été taquinés sur cette grande épreuve de force entre
un pirate de l’air et une détective d’élite ; c’était une chute. On ne s’en sortirait pas comme
ça. La vie de 600 personnes dans cet avion dépendait de cette réponse, vous vous
souvenez ?

« Bien sûr que je suis sérieuse. Cet home l’a dit lui-même, n’est-ce pas ? Il s’ennuyait
tellement qu’il a détourné l’avion. »

« … Ouais, mais il était probablement juste entrain de se moquer de toi, tu ne penses
pas ? »

« Oh ? Alors tu dis qu’il a menti ? »

« Huh ? »

Les yeux de Siesta se tournèrent de moi, vers Chauve-Souris. « La brillante détective lui
fait peur, et il a accidentellement laissé échapper quelque chose. Pour se couvrir, il dira
que c’était un mensonge pour me forcer à reconnaître ma défaite et mettre fin à la partie.
On peut donc déduire que c’est un lâche ? »

En parlant, elle ne montrait pas une once de peur.

« – Ha-ha. Ha-ha-ha. Ha-ha-ha-ha-ha ! Incroyable ! Ahhh, bien joué. Brillant. Ton courage,
c’est vraiment quelque chose. » Chauve-Souris se mit à rire. Au début, c’était silencieux,
mais petit à petit, comme s’il ne pouvait plus se contenir, il se mit à rire aux éclats, en se
tenant les côtes. « Ahhh, je n’arrive pas à y croire. C’est tout simplement insensé.

Je n’aurais jamais pensé que quelqu’un pourrait me coincer comme ça. Eh bien, tu m’as
eu. Je suis battu. »

Hey, woah, tu te moques de moi ?

Avait-il vraiment détourné l’avion juste parce qu’il s’ennuyait ?

Ou est-ce que le bluff incroyablement audacieux de Siesta avait anéanti sa volonté de se
battre ?

« Ça s’est terminé plus vite que je ne le pensais, mais on gagne un peu, on perd un peu.
J’ai déjà atteint mon objectif, alors je vais tirer ma révérence. »

Chauve-Souris descendit du corps du copilote et se dirigea vers nous.

« Ah, ne vous inquiétez pas. Celui-là est seulement inconscient, pas mort. Je vais
probablement être arrêté une fois que nous aurons atteint l’aéroport, mais je n’ai tué
personne. Si je m’installe dans la Grande Maison pendant un moment, ils me laisseront
repartir éventuellement. »

En soupirant, Chauve-Souris passa devant nous et regagna le siège qu’il occupait à
l’origine.

« Très bien, réveillez-moi quand nous atterrirons. Oh, et les médias vont être une plaie,
alors trouvez-moi un sweat ou quelque chose pour cacher mon visage, d’accord ? »

Puis, juste au moment où il allait sortir …

« Mon Dieu, tu es vraiment un menteur. » Les mots de Siesta ne contenaient aucune
émotion.

« … De quoi tu parles ? » Chauve-Souris s’arrêta dans son élan.

« Oh, rien, vraiment. »

« – Écoute-moi bien, Mademoiselle la Détective. T’as raison. Le vrai motif pour lequel j’ai
essayé de détourner cet avion n’est pas l’ennui. Par égard pour ton courage, je fais
semblant d’avoir perdu face à toi, tu comprends ? Aller, ne me fais pas tout dire. »

Alors c’était vraiment le cas, hein ?

Je pensais qu’il avait reculé terriblement vite, mais apparemment il a juste respecté
l’imprudence de Siesta.

Si j’avais dit que ça ne m’intéressait pas de connaître la vérité, j’aurais menti, mais la
police pourrait s’en rendre compte une fois que l’avion aurait atterri en tout sécurité.

Pour l’instant, l’important était de s’assurer que ce type ne change pas d’avis. Laissons-le
retourner à son siège sans le déranger. Cette pensée était la raison pour laquelle j’étais
l’assistant ici.

« Il a raison, Siesta. Il réagit comme un adulte, alors faisons la même chose que lui, et
retournons là ou nous étio–  »

« Non, je ne parlais pas de ce mensonge. »

… Oh, je vois.

Je suppose que quelqu’un qui serait capable de répondre comme une adulte ne serait une
brillante détective en premier lieu.

« La partie où tu avais dit que tu n’avais aucun scrupule à risquer ta propre vie dans ce
détournement. C’était un mensonge, n’es-ce pas ? Tu avais en fait peur de mourir ? »

Siesta ralluma la mèche.

« … Qu’est-ce que tu dis ? » Chauve-Souris nous tournait toujours le dos, mais il ne
bougeait pas, et sa voix était basse.

« Tu as reculé trop vite. »

« De quoi ? »

« Quand tu as admis ma victoire. Le Japon a une certaine réputation en matière de
sécurité aérienne ; il est impossible qu’un homme capable de détourner un avion japonais
tout seul, à notre époque, se retire si facilement à cause d’une fille. »

…  En fait, cela me dérangeait aussi

Pour avoir préparé un si gros coup, il avait abandonné bien trop facilement.  J’avais
essayé de me convaincre que nous étions juste chanceux, mais…  Siesta ne voulait pas
laisser passer ça.

« Tu as probablement exécuté de détournement sous les ordres de quelqu’un d’autre. En
outre, tu as même reçu l’ordre de t’écraser et de mourir avec l’avion. Ai-je tort ? »

« … »

Son silence indiquait qu’elle ne se trompait pas.

« Mais tu ne veux pas. Tu as, en fait, peur de mourir, alors tu nous as utilisés pour te
donner une excuse qui te permettrait de survivre. C’est ça ? »

Un pirate de l’air avait reçu l’ordre de mourir par quelqu’un d’autre. Il a d’abord désobéi à
l’ordre, mais en fin de compte, il a compris que sa vie avait de la valeur.

Il a donc eu l’idée d’appeler un détective et de mettre en scène un jeu de déduction : En
nous faisant deviner la raison du détournement, puis en annulant la tentative, il avait
sauvé sa vie et celle des passagers.

« Quand nous arriverons à l’aéroport, les fiics m’arrêteront, » avait dit Chauve-Souris en
soupirant — mais ce soupir était un soulagement, pas un regret.

Si le détournement échouait, Chauve-Souris serait tué par celui qui l’avait commandité.
C’est pourquoi il avait demandé à la police japonaise de le protéger jusqu’à ce que la
tempête se calme.

… Ce qui veut dire que sa raison n’avait plus aucune importance.

Siesta aurait pu dire n’importe quoi – l’argent, la libération d’un prisonnier, une question
diplomatique ou une raison quelconque – et Chauve-Souris aurait créé un baratin
plausible pour la convaincre qu’elle avait deviné juste. Après tout, celui qui voulait le plus
que le détournement échoue, était Chauve-Souris lui-même.

… Hmmm. Mais dans ce cas …

« Dans ce cas, pourquoi a-t-il fait des pieds et des mains pour faire sa scénette ? S’il avait
commencé à vouloir abandonner le détournement, il aurait simplement pu se rendre. Il
n’avait pas besoin de faire une chose pareille, n’est-ce pas ? »

Pas besoin de se donner la peine de trouver et de convoquer un détective. Tout ce qu’il
avait à faire était de descendre de l’avion par ses propres moyens, puis se rendre.

« Sa fierté ne l’aurait probablement pas permis, » murmura Siesta. « Tu ne voulais pas
perdre par défaut. Te voulais te battra et être vaincu. Même si ce n’était que de la
comédie. »

L’homme se tenait là, dos à nous, il ne disait pas un mot.

Pas un seul mot.

« Hé, dis-moi quelque chose avant la fin. »

Alors que Siesta et moi retournions à nos sièges, Chauve-Souris nous arrêta.

« Comment tu sais tout ça ? »

Finalement, après avoir été battu à plate couture par la brillante détective, le méchant de
l’histoire lui demanda pourquoi il avait perdu.

« Qu’est-ce qui m’a trahi ? Juste parce que j’ai reculé trop vite, ou … ? »

« Haaah. C’était un élément en plus, mais … » Semblant peu enthousiaste, Siesta se
retourna. « Je savais déjà tout sur toi. »

« … Qu’est-ce que tu veux dire par là ? »

« Je savais que tu serais dans cet avion aujourd’hui et que tu avais l’intention de le
détourner. Je sais pour tes camarades qui t’ont donné cet ordre. Tout. »

… Attends, quoi ?

Sachant tout ça, elle a quand même embarqué à bord ?

Elle savait comment tout allait de dérouler depuis le début ?

« Les détectives de premier ordre résolvent les affaires avant même qu’elles ne se
produisent, tu vois. J’étais juste un peu en retard, puisque je suis allée me reposer. »
Siesta passa ses doigts dans ses cheveux.

C’est de là que lui vient son nom de code ? Elle n’a pas l’air hispanique.

« … Je vois. Alors c’était ça. » Toujours dos à nous, Chauve-Souris répondit
impassiblement à la demande de Siesta « Eh bien,je suis vraiment content d’avoir
demandé cette seule chose, juste au cas où, avant la fin. »

« Assistant, baisse-toi, » murmura Siesta à côté de moi.

« Le truc, c’est que quand des agents de première ordre trouvent une jeune pousse, on la
fauche avant qu’elle ne puisse grandir. »

Au moment où Chauve-Souris prononça cette phrase, ou peut-être juste avant, un
puissant choc me traversa.

« Ow, ow, ow … »

La minute suivante, mes fesses étaient sur le sol.  Est-ce que quelque chose – Siesta
m’avait poussé ?

« Hey Siesta, qu’est ce que c’était que … Hein ? »

Elle était en face de moi. Un liquide rouge foncé sortait de son épaule et coulait sur ses
vêtements.

Au-delà d’elle, Chauve-Souris était immobile, ratissant ses cheveux avec ses doigts – et
de sa tête, ou plutôt de son oreille, une sorte de tentacule à la pointe acérée poussait.

« Changement de plan. Je vais te massacrer et laisser le reste. »

◆Mystère rencontre sci-fi/fantastique

« … Ghk. »

« Siesta ! » Je courus vers la détective déchue – déchue parce qu’elle m’avait protégé.

« Rgh, je n’aurais pas du engager d’assistant … Tu n’as été d’aucune utilité jusqu’à
présent … »

« C’est pas juste du tout ! C’est toi qui m’a mis la pression, d’accord ?! »

Elle a raison quant à mon inutilité pourtant !

Non, ce n’était pas le moment d’avoir ce genre de disputes.

« Quelle est cette chose … ? »

Le tentacule de l’oreille droite de Chauve-Souris se tordait comme si il possédait une
conscience. Il était d’une couleur grotesque, comme si on mélangeait du vert foncé et du
violet. Il semblait également capable de s’étirer et de se contracter librement ; on ne
pouvait pas savoir quelle était l’étendue de son champ d’action.

« C’est un pseudo-humain. » En tremblant, Siesta se leva, tenant son épaule blessée.
« Cet homme est un membre de l’organisation clandestine SPES. Ils utilisent des pouvoirs
qui dépassent l’entendement pour créer des peudo-humains. Ils ne sont pas connus du
public, mais ils constituent une menace pour le monde. »

« Des pseudo-humains… ? C’est insensé. Alors il est … Chauve-Souris n’est pas … ? »

Il n’est pas humain ? Elle dit que c’est un monstre ?

« Avec lui, ce n’est que son oreille. Il a simplement volé un prototype et l’a attaché de
force à son oreille. En gros, c’est un pseudo-humain mais qu’à moitié. »

« Siesta, comment tu sais tout ça … ? »

« Alors, comme il avait trahi l’organisation, on lui a confié cette tâche en guise de
punition. »

« Je t’ai posé une question Siesta ! Comment tu sais tout ça ?! »

Ne me dit pas qu’elle vient de ce groupe aussi ?

Cependant, la voix grave de Chauve-Souris effaça ce doute.

« Tu connais des trucs, hein ?! Dans ce cas, leur ramener ton cadavre comme petit
souvenir serait un meilleur plan ! »

Le tentacule se dirigea à nouveau vers nous.

« Accroche-toi assistant. »

« Huh ? … Woah ! »

Je volai dans les airs – ou plutôt, Siesta me serrait contre elle et avait sauté hors du
chemin.

Ses cheveux blancs comme la neige me piquaient la joue.

Elle s’appelait Siesta, une sieste faite pendant la journée — et la vue semblait vraiment
aussi surréaliste qu’un rêve éveillé.

« Es-tu humaine ? »

« Es-tu stupide Kimi ? J’ai l’air d’un monstre ? »

« Je dis juste que je ne serais pas surpris si tu l’étais. »

« … Je parierais n’importe quoi que tu n’as pas de petite-amie Kimi. »

Mais ce n’était pas le moment d’avoir une conversation stupide.

Avec six cents gens dans l’avion, bien sûr qu’ils remarquaient le vacarme.

« H-hey ! Qu-qu-qu’est ce que ça ?! »

« Eeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeek ! »

Quelques gens curieux de la situation venaient voir, et une vague de cris et de hurlements
de colère commença à remplir l’avion.

« M-medames et messieurs ! S’il vous plaît, restez calmes ! »

L’hôtesse de l’air, dont le maquillage était déjà réduit à néant, s’empressait d’aller calmer
les passagers. Mais l’avion était réduit à un pandémonium.

« Argh, si c’est comme ça, je m’en fous, » dit Chauve-Souris. « Je vais juste tuer tous les
humains dont je n’ai pas besoin. »

« – ! Attends, réfléchis-y ! Si tu fais ça, l’avion va s’écraser et tu vas mourir aussi ! » criai-
je.

« Ha ! Je laisserais le pilote en vie. Attends, t’es qui déjà ? »

« Je suis l’assistant de la brillante détective ! »

Bon sang, maintenant elle me le fait dire. Admirez le pouvoir du conditionnement.

« Oh, tu m’as appelée brillante détective. Quel apprenti modèle. »

« J’ai juste dit quelque chose qui sonnait bien. Et puis, je suis ton assistant, pas ton
apprenti. »

Argh, vraiment ? Je l’ai encore fait ? Merde, elle est franchement forte.

« Sérieusement, c’est quoi ce truc ? » Demandai-je. « Tu as dit ‘pseudo-humain’ comme si
c’était normal, mais … »

Je m’accrochais à Siesta alors que nous évitions les attaques de Chauve-Souris.

« Les pseudo-humains sont des monstres créés autour d’un noyau constitué d’un certain
objet . Celui-là se bat avec son oreille, mais il y en a plein d’autres qui se battent avec
leurs yeux, leur nez, ou leurs dents. »

« – Et toi tu combats ces monstres ? »

« Oui, bien que ce soit la première fois que je me retrouve en combat réel avec un. Kimi,
tu ne sais rien du monde, n’est-ce pas ? »

« Hé, aucun collégien respectueux des lois n’en saurait autant sur cette face cachée du
monde. »

« Peut-être, mais tu es un collégien qui traverse l’océan avec un mystérieux attaché-
case. »

« Attends, qu’est-ce que tu sais au juste ?! »

Elle avait même des vues sur moi ?

En plus, cet attaché-case n’a rien à voir avec cette affaire, n’est-ce pas ? Je te jure, je ne
sais vraiment rien, d’accord ?

« Qu’est-ce que ces rigolos cherchent à faire ? Ils comptent utiliser le détournement pour
déclarer la guerre au Japon ou quoi ? »

« En latin, le mot SPES signifie ‘espoir’ – et leur but est d’accorder le ‘salut’. » Au fur et à
mesure que Siesta expliquait, elle faisait des bonds en me tenait toujours dans ses bras.

« Ça ressemble à une religion douteuse … »

L’instant d’après, le tentacule de Chauve-Souris plongea dans le sol où nous nous
situâmes.

Nous volions à dix mille mètres. S’il faisait un trou dans l’habitacle de l’avion, cette histoire
allait se terminer rapidement.

« Je n’arrive pas qu’une aussi grosse menace pour nous se cache au Japon ! » se plaignit
Chauve-Souris.

« Tout détective digne de ce nom travaille en secret. D’ailleurs, aucun de tes compagnons
ne savait que j’existais, n’est-ce pas ? » railla Siesta.

Elle projetait une aura pleine de sang-froid, mais aussi proche que nous étions, je pouvais
dire à sa façon de respirer qu’elle n’était pas en bonne forme.

Elle avait dépensé beaucoup d’énergie. C’était naturel. Elle se battait tout en me
protégeant, et j’étais un boulet.

« Ha-ha ! Dans ce cas, tous tes secrets sournois seront inutiles après aujourd’hui. »

« Oh ? Mais tu ne peux pas retourner dans ton organisation, tu te souviens ? Tu ne
pourras pas les prévenir. »

« Eh bien, à ta place je ne serais pas si sûr de ça. Si je les soudoie avec des informations
sur toi, même cette bande de coincés pourrait changer d’avis. »

« Tu es sûr que ça sera aussi facile ? »

« Ha ! Tu parles comme si tu savais. »

Une fois de plus, tel un serpent volant, le tentacule acéré et tordu se dirigea vers Siesta.

Nous étions dans un avion, sans accès à des armes efficaces, ce qui signifie que nous
devions rester sur la défensive. C’était une bataille d’usure que nous allions perdre.

« Qu-est ce qu’il y a ? Tu respires assez fort. »

« … Je faisais attention à le cacher. » Pour la première fois, l’expression de Siesta
s’assombrit légèrement.

« Ha-ha, ces oreilles sont faites sur mesure. Les cellules acoustiques concentrées dans
l’extrémité de ce tentacule peuvent même capter les battements de cœur d’une personne
située à une centaine de kilomètres. »

« … J’aurais dû rassembler plus d’informations. Je suppose que je ne peux pas vraiment
dissimuler mon rythme cardiaque. »

Même si elle était une brillante détective, elle n’était pas omnisciente. La sueur perlait sur
son front. Mais pour l’instant, il n’y avait rien à faire.

« Si seulement j’avais une arme ou quelque chose … »

Évidemment, mais nous étions à dix mille mètres d’altitude.

Tout ce dont nous disposions était déjà là, et la sécurité n’autorisait même pas un couteau
à bord. Aucun des passagers ne pouvait avoir quelque chose ressemblant à une arme
dans ses bagages …

Non. Il y avait quelqu’un.

« Siesta, gagne trente secondes. »

« Assistant ? »

« J’ai une idée. »

Même dans un moment comme celui-ci – ou peut-être parce que c’était un moment
comme celui-ci – mon esprit turbinait.

J’étais sans cesse entraîné dans des ennuis depuis tout petit. Au cours de ma vie, j’ai
survécu à plus d’horribles situations que je n’ai mangé de tranches de pain. Mon
expérience passée me disait que cette intuition était la meilleure solution.

« Très bien. Tu n’as rien fait, donc pas de plaintes ici. »

« Laisse-moi juste avoir mon moment, d’accord ?! »

Alors qu’on se laçait des absurdités à la figure, je courus comme un dératé jusqu’à mon
siège.

« Bougez, bougez ! Dégagez le passage ! »

En me frayant un chemin à travers les passagers, qui bloquaient les allées dans la
confusion, j’atteignis mon siège et sortis cet attaché-case du compartiment à bagage.

Naturellement, je n’avais aucune idée de ce qu’il contenait. Je ne savais pas si ça pouvait
être utile dans cette situation. Le chat dans la boîte est-il vivant, ou mort ?

Cependant, pendant l’inscription des bagages à main dans l’aéroport, j’avais remarqué
que le personnel échangeait des regards.

J’avais été préoccupé par le niveau de sécurité des aéroports japonais … mais grâce à
cela, j’avais pu faire de pari.

« Siesta ! Attrape ! »

Revenir en courant prendrait trop de temps ; je lançai de toutes mes forces d’attaché-case
argenté, ridiculement grand, vers le champ de bataille.

« Ghk ! Je te laisserai pas faire ! » Au lieu de viser Une Siesta ensanglantée, Chauve-
Souris dirigea le tentacule et fracassa l’attaché-case — mais du coup, le contenu tomba
directement dans les mains de Siesta.

Et puis, Siesta tira sur le tentacule avec un mousquet fraîchement acquis.

« Gwaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaargh ! »

Mon pari était réussi.

Pulvérisant un liquide grotesque dans tous les sens, le tentacule se glissa à nouveau dans
l’oreille de Chauve-Souris. Siesta ne s’arrêta pas là. Elle réduisit la distance entre elle et
Chauve-Souris très rapidement, le plaqua au sol, lui enfonça l’arme dans la gorge et —

« Bang ! »

— imita le son d’un coup de feu.

Chauve-Souris était déconcerté, mais Siesta était calme et posée. « Voilà, » dit-elle. « A
partir de maintenant, tu es mort. »

Chauve-Souris lui lança un regard déconcerté, se demandant visiblement de quoi elle
parlait.

Je ne savais pas non plus ce qui se passait ici. Alors elle n’allait pas l’achever … ?

« Maintenant, tes camarades ne viendront pas te chercher. Après tout, tu n’es qu’un
cadavre. »

« … Sale gamine. Tu te fous de moi ? » Chauve-Souris grogna pendant qu’elle retirait le
fusil.

« Eh bien, tu ne veux pas mourir, n’est-ce pas ? »

« …Ha ! Après ça, c’est hors de question. J’allais t’utiliser comme appât, et tu m’as battu.
Ils vont m’éliminer à coup sûr. »

« Tu n’as pas à t’inquiéter. Je ferai en sorte que les médias rapportent que tu es mort ici. »

« T’es qui exactement … ? »

« Je vais aussi demander à la police japonaise de te protéger. Tout va bien. J’ai une bonne
connaissance là-bas. »

Chauve-Souris rit de façon incrédule … Franchement, j’avais envie de faire la même
chose.

Mais qu’est-ce que c’est que cette fille ? Le mot détective était un peu exagéré je pense.

« Si tu ne me tues pas ici, tu vas le regretter. »

« Pourquoi ? »

« Je suis rancunier. Je jure que je me vengerai de cette humiliation. »

« Tu ne pourras pas. » Siesta se leva, libérant Chauve-Souris. « La balle rouge que je t’ai
tirée il y a une minute était faite de mon sang, tu vois ? Quiconque est touché par mon
sang devient absolument incapable de défier son maître. Ce qui signifie que ton tentacule
ne pourra plus jamais m’attaquer. »

« … Comment cette merde fonctionne ? »

« Secret commercial. »

« Quelqu’un t’as engagée pour ça aussi ? »

Siesta sourit faiblement.

« Non – je suis née pour être une brillante détective. C’est comme ça que je suis
branchée. »

Je vois. Apparemment, il y a des gens dans le monde avec un ADN encore pire que le
mien.

Enfin, ceci mis à part …

« Désolé de t’interrompre pendant que tu mets un point final à tout ça, Siesta, mais … »

J’avais des questions importantes sur un élément de la conversation.

« Cette ‘balle rouge’ dont tu as parlé — comment tu as trouvé le temps de la faire ? »

J’avais jeté l’attaché-case, Chauve-Souris l’avait détruit … et Siesta avait attrapé le
mousquet au vol, puis tiré sur le tentacule. Voulait-elle dire qu’elle avait eu le temps de
fabriquer une balle si spéciale pendant ces quelques secondes ?

Non, ce n’était vraiment pas possible.

Ce qui veut dire qu’elle était déjà prête … et que Siesta devait être au courant. J’avais un
mauvais pressentiment à ce sujet.

Toujours aussi nonchalante, Siesta dit : « C’est moi qui leur ai dit de te faire monter avec
cet attaché-case dans l’avion en premier leu. »

« Alors tu tirais les ficelles depuis tout ce temps ?! »

Et c’est ainsi que notre éblouissante aventure de trois ans commença.

◆Même maintenant, je me souviens

« C’est comme ça que j’ai rencontré Chauve-Souris — et l’ancienne détective de génie. »

Aussi longue que cette histoire était, Natsunagi était finalement au courant du vieux
souvenir que Chauve-Souris et moi partagions.  Si je racontais ce qui s’était passé il y a
quatre ans, il n’y avait pas moyen d’éviter le sujet de mon ancienne partenaire.

Cela faisais longtemps que je n’avais pas parlé d’elle, et même si tous mes souvenirs
n’étaient pas forcément bons — pour des raisons qui m’étaient incompréhensibles — ils
me faisaient sourire.

« Je vois … Ok. Je comprends votre histoire, mais, euh, » dit Natsunagi en se reculant de
manière furtive, « ça ne veut pas dire qu’il est super dangereux ? »

Elle recula jusqu’au mur opposé, essayant de mettre de la distance entre elle et Chauve-
Souris.

« Ah, hmm, bien. »

« C’est tout ce que tu as à dire ? T’es un personnage plutôt dangereux toi aussi,
Kimizuka. »

Maintenant que j’y pense, je n’avais pas informé Natsunagi de mon problème à me laisser
entraîner dans des incidents … mais elle avait dû s’en rendre compte quand elle a
découvert que je connaissais des gens dans la police et un prisonnier.

« Aussi, je ne veux pas que quelqu’un comme lui écoute mon cœur… »

Eh bien, oui, elle avait raison. Avoir ce vilain tentacule sur la poitrine pouvait être une
expérience assez traumatisante et dévastatrice pour une adolescente. Je ne voudrais pas
que ça m’arrive non plus.

« Non, non. J’entends très bien ton cœur d’ici, et en fait, ma chérie, je l’ai déjà identifié. »

Chauve-Souris comprit ce qui nous inquiétait et mena la conversation.

… Mais qu-avait-il dit à l’instant ? Voulait-il dire qu’il avait déjà une idée de l’identité du
donateur de Natsunagi ?

« Chauve-Souris, tu veux dire que tu as déjà rencontré le propriétaire du cour de
Natsunagi ? »

« Ouais. C’était le but de cette vieille histoire. »

Ce type n’avait jamais eu autant de sens. Qu’est-ce que cette histoire peut avoir à faire
avec le cœur de Natsunagi ? Il ne disait pas que son donneur était dans l’avion il y a
quatre ans, si ?

« — Oh. »

Derrière moi, Natsunagi murmurait doucement.

« Qu’est-ce qu’il y a ? Tu as trouvé quelque chose ? »

« … Eh bien, c’est juste que … je trouvais ça étrange. »

Si nous parlions d’étrange, Natsunagi l’était depuis notre rencontre … mais faire une
blague en ce moment aurait été mal vu.

« Tu vois, je ne suis pas vraiment du type à faire ce genre de choses. »

« De quoi tu parles Natsunagi ? Tu agis bizarrement depuis un moment maintenant. »

« Tu as raison. Je suis bizarre. Parfois, je ne comprends pas pourquoi je fais certaines
choses — c’est comme si j’arrêtais d’être moi-même. » Le calme habituel de Natsunagi
avait disparu, et elle se serrait légèrement les épaules. « Je veux dire, je ne suis pas du
genre à faire une chose pareille à un garçon que je viens de rencontrer. »

Parlait-elle de ce qui s’était passé dans la classe la veille ? Qu’elle n’était pas si
audacieuse que ça ?

Dans ce cas, qu’est-ce qui l’avait poussé à le faire ? Eh bien, je lui avais parlé de quelque
chose de similaire la veille.

« Transfert de mémoire — c’est ce que tu as dit Kimizuka. Tu te souviens ? Cela signifie
que ce n’est pas moi ai fait ça. Je parie que le propriétaire de ce cœur m’a fait faire ça. »

Dans cette logique, avant de mourir, le donneur de Natsunagi pouvait faire « ce genre de
choses ».

Quelqu’un qui ne se soucie pas de la honte, de sa réputation ou des moyens, tant que
c’est pour une fin qu’il croit juste.

Je ne connaissais qu’une seule personne capable de faire un tel tour.

Et cette personne — était morte il y a exactement un an.

… Non. Ne me dites pas.

Une telle coïncidence n’arriverait jamais. C’est tout simplement grotesque.

Une goutte de sueur perla sur mon front. Mes mains et mes pieds s’engourdirent et mes
dents claquèrent.

Arrête ça. S’il te plaît, arrête.

Ne me suis plus.

Je ne suis plus ton partenaire maintenant.

Ce n’est pas vrai ?

Tu es déjà morte, n’est-ce pas ?

« Le déni ne rend pas bien sur toi Watson. »

Quand je levai le regard, Chauve-Souris me regardait avec des yeux troubles. Comme s’il
disait de ne pas fermer les miens.

« Voici la réponse. »

La tentacule que j’avais vu ce jour-là sortit de l’oreille de Chauve-Souris. Toujours cette
teinte grotesque, comme si on avait mélangé des dizaines de couleur, et cette façon
écœurante de bouger.

« Ne fais pas ça Chauve-Souris. »

« Faire quoi ? »

« Si tu tues quelqu’un, tu seras pendu pour ça. »

« Exact. Si, » dit Chauve-Souris « Mais tu sais que je ne peux pas la tuer avec ça, n’est-ce
pas ? »

« Arrête ! »

La tentacule s’aiguisa en pointe et visa le cœur de Natsunagi et — quelques centimètres
avant de la toucher, la pointe s’effrita.

Ce phénomène ramena des souvenirs dans mon esprit.

C’était quelque chose qu’une certaine personne avait dit, il y a quatre ans :

« Ton tentacule ne pourra plus jamais m’attaquer. »

Quiconque était touché par ce sang devenait absolument incapable de défier son maître,
avait-elle dit.

Le tentacule de Chauve-Souris n’avait pas été capable d’attaquer Natsunagi … ou pour
être plus précis, le cœur qui est en elle. Ce qui veut dire —

« Siesta, c’est toi ? »

La nostalgie que j’avais ressenti dans cette classe au moment du coucher de soleil,
lorsque Natsunagi m’avait tenu dans ses bras — le déclencheur avait été le battement de
cœur de ma pire et plus chère ancienne partenaire. Je l’avais revue pour la première fois
en un an.

« Dès que vous êtes entrés, j’ai pensé que cette fille était ta partenaire. »

Maintenant qu’il le mentionnait, quand nous sommes entrés, Chauve-Souris était devenu
étrangement nostalgique…  Était-ce parce qu’il avait entendu le son du cœur de sa pire
ennemie ?

Chauve-Souris ne pouvait pas voir, donc quand il a entendu ce battement de cœur, il a
pris Natsunagi pour Siesta. C’est pour ça que notre conversation n’aboutissait pas au
début ?

« Quand est-ce que cette brillante détective est morte ? Demanda Chauve-Souris en
plissant les yeux.

« … Il y a un an. Sur une île lointaine, dans un océan lointain. »

« Je vois, même si elle était mon ennemie, c’est dommage. »

« Oui. Sorti de nulle part, juste comme ça, c’était fini. »

« Comme ça ? Ne sois pas idiot. Même après sa mort, la détective est revenue vers toi. »

Pendant un instant, les mots de Chauve-Souris me serrèrent la poitrine.

Siesta est revenue vers moi — ouais. Ce serait poétique, n’est-ce pas ? Si c’était vrai.

Cependant, elle serait la dernière personne à faire une chose pareille. Elle était une
détective logique — cette théorie était trop commode, trop banale, trop émotive.

… En plus, j’étais un assistant minable.

Oui, je l’admets. Je me plaignais constamment… Mais en réalité, je savais à quel point
Siesta était incroyable, et à quel point nous étions opposés.

Je n’étais que son ombre, une forme sombre suivant une belle fille qui dansait aussi
légèrement qu’un rêve dans la lumière vive du soleil.

C’est pourquoi… C’est pourquoi je savais que dire que Siesta m’était revenue n’était pas
correct.

Après tout, elle m’a sans doute oublié depuis longtemps maintenant.

« C’est une coïncidence, » murmurai-je, mais je ne parlais pas vraiment à Chauve-Souris.
C’était un rappel à moi-même. « Rencontrer Natsunagi, et qu’elle ait le cœur de Siesta,
c’est juste —  »

C’est alors que Natsunagi me gifla.

« … Est-ce que la propriétaire du cœur t’a fait faire ça aussi ? » demandai-je.

« Non ! »

Quand je l’ai regardé, elle pleurait. « J’ai fait ça toute seule ! Je t’ai frappé parce que je le
voulais ! »

Ses yeux étaient rouges, son visage était froissé et elle éclata à plein poumons ?

« Kimizuka, ose dire ça encore une fois ! C’est une coïncidence ? Ces retrouvailles sont
une coïncidence ? Allez ! Pourquoi es-tu si irresponsable et fataliste ? Ce sont des
retrouvailles, ne les balaie pas d’un revers de main ! Ce sont des sentiments ! Vous avez
été ensemble pendant trois ans, et elle veut être avec toi même après sa mort ! C’est le
seul souhait de ce petit cœur ! J’ai — Ce cœur t’as cherché tout ce temps, Kimihiko
Kimizuka ! Pour pouvoir te revoir … Juste pour pouvoir te revoir ! Et là, tu essaies de la
faire taire avec un mot comme coïncidence ! Ces sentiments comptent ! »

L’instant d’après, je courus vers elle et attira son corps mince dans mes bras.

Je comprends. Je le vois maintenant.

C’était comme j’avais dit — le cœur de Natsunagi cherchait quelqu’un.

« X, » la personne que Natsunagi essayait de trouver depuis un an, que Siesta essayait
de trouver, c’était … moi.

Siesta voulait me voir ?

« Tu es là ? » demandai-je.

Pas de réponse. Bien sûr qu’il n’y en avait pas.

La détective est déjà morte.

Mais …

« Ça fait un bail, Siesta. »

… la chaleur de cette poitrine était définitivement la sienne.

« En fait, il y a une tonne de choses que je voulais te dire. »

A quel point penses-tu que ma vie était dure après être devenu ton assistant ?

J’ai été forcé de passer une arme en contrebande, et nous nous sommes retrouvés dans
une bataille paranormale contre une organisation obscure, nos noms se sont répandus
dans la société de la pègre, j’ai fini par devoir voyager avec toi à travers le monde pendant
trois années entières tout en fuyant nos poursuivants ; nous étions fauchés et vivions au
jour le jour en combattant une bande de pseudo-humains, dormant à la belle étoile
pendant les ouragans, et parfois, les jours où nous gagnions gros au casino, nous
sautions sur le lit d’un complexe hôtelier ensemble, et le lendemain, nous étions à
nouveau sans le sou. On a traversé des déserts, des jungles, des montagnes, des
océans, et puis, et puis —

« — Pourquoi t’es partie en première crétine ? »

Je n’avais pas de sentiments pour toi ou quoi que ce soit.

C’était pareil pour toi, n’est-ce pas ?

Toi et moi, n’étions pas amoureux, et je suis sûr que nous n’étions même pas vraiment
amis.

Nous étions détective et assistant, juste des partenaires d’affaire, d’une manière étrange.

Mais … Mais quand même …

Tu m’as recruté, tu te souviens ?.Tu ne peux pas juste mourir et me laisser après ça. Dis-
moi au moins au revoir avant de partir.

« C’est pour ça que tu es revenue ? »

Pour dire au revoir ?

Ou peut-être …

« Je suis impatiente de poursuivre cette relation. »

En parlant, Natsunagi s’éloigna doucement de moi.

Son visage était — Non, j’ai vraiment dû l’imaginer cette fois.

Mais je pouvais presque voir un sourire familier à cent millions de watts.

◆La détective est déjà morte

Après cela, Mme Fuubi vint nous chercher, et Natsunagi et moi la suivîmes hors de la
prison.

« Vous avez pu poser vos questions ? » Les mains sur le volant de la voiture de police,
Mme Fuubi nous adressa cette question.

« … Oui, plus ou moins. »

Les yeux de Natsunagi étaient encore rouges, et je répondis pour elle.

« Wow. Ses lèvres se sont subitement déliées. »

« Ça dépend probablement du sujet. Il ne dira pas un mot sur cet autre sujet, n’est ce
pas ? »

« Cet autre sujet » était la raison pour laquelle Siesta avait capturé Chauve-Souris vivant
dans ce avion. Mme Fuubi l’avait ensuite placé en détention, mais même quatre ans plus
tard, elle n’avait apparemment pas réussi à lui soutirer d’informations significatives.

Pour votre information, depuis la mort de Siesta, nous avons un cessez-le-feu avec SPES.
Ou pour être plus précis, ils ont arrêté de faire des efforts pour me combattre. Je suppose
que ça veut dire que je n’ai été que le larbin de la brillante détective, en ce qui les
concerne. Dommage.

« Eh bien, je suis contente que vous ayez eu ce que vous vouliez de toute façon. Vous
feriez mieux d’être reconnaissants. »

Mme Fuubi semblait oublier que nous l’avions suivie parce qu’elle avait des affaire à régler
ici. Dans tous les cas, j’étais vraiment reconnaissant.

Il y avait une chose cependant. Une question que je n’arrivais pas à me sortir de la tête.
« Tu savais tout depuis le départ, n’est-ce pas, Mme Fuubi ? »

« De quoi parles-tu ? »

« A qui appartenait le cœur de Natsunagi. »

« Qu’est-ce qui te fait penser ça ? »

« C’est une bonne question, et je ne sais pas trop comment y répondre. Juste une vague
intuition. »

Je n’avais rien de solide sur quoi me baser. Mais après qu’elle nous ait amenés
directement à l’homme que nous devions voir, je ne pouvais pas croire que cela ne
signifiait rien.

Et si c’était le cas, alors peut-être que l’objectif que Mme Fuubi était —

« Natsunagi. »

J’étais sûr de devoir dire ça maintenant.

Toujours en regardant devant moi, je parlai à la fille assise à côté de moi.

« Peu importe à qui appartient ce cœur, il est normal que tu vives ta propre vie. Tu n’as
pas à remplacer qui que ce soit. »

Je vis le reflet de Mme Fuubi se dégonfler dans le rétroviseur.

Désolé, mais je vous laisser le soin d’écraser les pseudo-humains. Je ne vais pas mêler
Natsunagi à tout ça. Je ne vous laisserais pas faire d’elle la remplaçante de Siesta.

« Kimizuka … »

Quand je jetai un coup d’œil sur le côté, Natsunagi me fixait, abasourdie.

« Qu’est-ce qui ne va pas ? »

« … Rien. »

Peu après, elle secoua légèrement la tête.

« — Merci ! »

Elle sourit, comme une fleur qui fleurissait.

« Ahhh, eh bien, c’était éprouvant. »

Après que Mme Fuubi nous déposâmes devant la gare, je m’étirai.

Je le jure. Mon premier vrai travail en un an … et pour ne rien arranger, il a fait remonter
de façon inattendue tout un tas de traumatismes passés et d’autres trucs aléatoires.
J’avais l’impression d’avoir reçu la raclée de ma vie.

« C’est ma faute ? » Natsunagi me regarda dans les yeux, en s’excusant de manière
inhabituelle.

« Ce n’est pas ce que j’ai dit. En fait, je te suis reconnaissant. »

« Huh… ? » Ses yeux déjà ouverts devinrent encore plus grands.

« Grâce à toi, eh bien, euh … »

Hmm. Même moi, je n’arrivais pas à trouver les mots corrects pour le dire. Mais quand j’ai
rencontré Natsunagi et que je me suis retrouvé face à mon passé…

« J’ai commencé à penser que ce n’était pas bien de rester comme ça. »

Ou du moins, je pense que je l’ai fait. Je ne peux pas encore en être sûr.

« Si c’est le cas, alors je … » Natsunagi se mordit la lèvre. Elle semblait réfléchir
sérieusement.

Qu’est ce que c’est ? Était-elle encore préoccupée par quelque chose ?

J’envisageai de demander, mais —

« Merci pour aujourd’hui. »

— Je fis demi-tour, comme si je n’avais rien remarqué.

Après tout, j’avais déjà répondu à la demande de Natsunagi.

Je n’avais plus besoin d’être impliqué avec elle. Nous devions couper les ponts ici et
maintenant.

Inutile de dire que Natsunagi et moi n’étions pas amoureux, et je suis sûr que nous
n’étions pas vraiment amis.

Détective (remplaçant) et cliente — voilà ce qu’était notre relation. Maintenant que la
demande était clarifiée, nous n’avions aucune relation du tout.

Ce qui signifie que je devais quitter Natsunagi rapidement.

Elle avait réussi à avoir une nouvelle vie. Cela signifie qu’elle ne devait pas être liée par
Siesta.

Et puisque je pouvais être un élément déclencheur qui la ferait penser à Siesta, elle ne
devait pas non plus s’impliquer avec moi.

« A plus tard. » Avec ces pensées en tête, je fis un pas vers la porte de la gare —

« Attends. »

— ou essaya, jusqu’à ce que des doigts fins attrapèrent ma main droite.

« … Qu’est-ce qui se passe Natsunagi ? »

« Non, hum … »

Ses doigts étaient toujours fermés autour des miens. Ses yeux fixaient le sol, elle ouvrait
la bouche, comme pour dire quelque chose, puis la refermait.

Je savais ce qu’elle voulait dire, ce qu’elle essayait de dire pour être gentille.

Mais je ne pouvais pas la laisser faire.

C’était sa vie. Je ne pouvais pas lui faire porter le fardeau de quelqu’un d’autre.

Au-dessus de nos têtes silencieuses, une chanson d’idole était diffusée sur l’écran géant à
l’extérieur de la station. C’était probablement une sorte de vidéo promotionnelle. Une
collégienne chantait une chanson pop en faisant des clins d’œil coquets à la caméra. Cela
rendait aussi le silence 20 % plus gênant.

« Si tu n’as rien à dire, je m’en vais. »

« … T’es un peu con Kimizuka. » C’était la troisième fois qu’elle me disait ça.

Oui, je sais. Quelque chose a vraiment déraillé quand ma personnalité a été créée.
Désolé pour ça.

Laissant Natsunagi derrière moi, j’essayai, une seconde fois, de me diriger vers le portique
à billets, quand —

« Excusez-moi ! »

— quelqu’un d’autre arriva et m’arrêta encore une fois.

Je jetai un coup d’œil sur le côté. Natsunagi était là. Elle avait incliné la tête en signe de
confusion. Ce n’était pas elle cette fois.

Je baissai légèrement les yeux, puis le propriétaire de cette voix apparut.

C’était une collégienne. Son visage était à moitié caché par une capuche, mais l’oeil qui
me regardait brillait un peu trop fort, et l’aura qui l’entourait ne pouvait pas appartenir à
une personne ordinaire.

En fait, j’avais l’impression de l’avoir déjà vue quelque part…

Natsunagi et moi lavâmes les yeux au ciel, et une idole à l’air très familier chantait toujours
sa chanson sur l’écran géant.

« Euh, en fait, je suis une idole chanteuse. »

Hé, allez, je viens de finir un travail. Pourquoi les clients se présentent-ils l’un après l’autre
comme ça ? … Attends, s’il y a une raison …

Je regardai Natsunagi — ou plutôt son cœur.

Il s’est avéré que mon sixième sens était en plein dans le mille.

« J’ai un problème, j’aimerais qu’un brillant détective s’en charge ! »

Bon sang. Alors je dois encore expliquer tout ça ?

« Désolé, je ne suis pas vraiment un détective … »

Mais alors —

« Oui, je suis désolée, le fainéant ici n’est qu’un assistant. »

— Natsunagi m’envoya un regard calme et significatif. Elle me disait, c’est la voie que j’ai
choisi.

« Hein ? Alors… »

« Ce n’est pas grave. »

Natsunagi parla à l’idole déconcertée.

A sa nouvelle cliente.

« Si tu as besoin d’une détective, tu en as trouvé une. Je suis la brillante détective —
Nagisa Natsunagi. »

La détective est déjà morte.

Mais son dernier souhait ne mourra jamais.

Le monologue d’une fille 1

J’ai l’impression d’avoir cherché quelqu’un pendant des années, avant même de savoir ce
que je faisais. Mais en réalité, cela ne faisait environ qu’un an … et pour être honnête, j’ai
l’impression que mon « identité », si c’est le mot qui convient, n’a été établie que
récemment.

Non, attendez. Ne vous moquez pas de moi dans l’immédiat.

Depuis toute petite, j’étais malade et alitée. Je n’avais pas besoin d’un sentiment d’identité
… enfin, pour être plus précise, je suis sûre que je faisais tout pour en pas en avoir.

Je voulais enfiler une paire de chaussures de sport et sprinter sur une piste. Je voulais
rentrer du lycée avec un grand groupe d’amis et m’arrêter pour prendre un bubble tea tous
ensemble.

Mais ce n’a jamais été une possibilité.

Et si le souhaiter ne pouvait pas faire arriver tout ça, alors il valait mieux ne rien souhaiter.
Avec ça dans l’esprit, je me suis constamment prévenue de ne pas développer une
identité.

Je n’ai pas beaucoup de vieux souvenirs, vraiment. Peut-être quelques bribes où je
m’apercevais bordée dans le lit d’une petite pièce, mais à part cela, pas grand-chose.
Quand j’essayais, ma tête me faisait subitement mal —

Mais ça allait. C’était en tout cas ce que je me disais.

Et puis un jour, je développai un souhait que je voulais désespéramment réaliser.

Cette poitrine, ce cœur, criait qu’il voulait voir quelqu’un.

Qu-est-ce que je devais faire ?

Je n’avais jamais souhaité quoi que ce soit. Je n’avais jamais pensé avoir la chance
d’accomplir quoi que ce soit.

Qu’est-ce que je pouvais faire ? Étais-je capable d’exaucer le vœu de ce cœur ?

— L’instant d’après, je me mis à courir.

Maintenant, j’avais des jambes qui pouvaient toucher l’asphalte et le repousser loin de
moi. Une tempête d’émotions s’était accumulée en moi depuis dix-huit ans. Tant que je
l’avais, j’étais invincible.

« Tu es le brillant détective ? »

Et puis, l’espoir que j’avais trouvé était apathique, sans ambition et résigné. Il avait
renoncé à presque tout. Il me rappelait la personne que j’étais.

Je ne pouvais donc pas le laisser comme ça. Je finis par le gronder, et, je l’ai
accidentellement laissé me voir pleurer. Je … ne voulais pas que tout cela arrive.

Et puis, je fis une autre gaffe, et le laissai me sauver à nouveau.

« Peu importe à qui ce cœur appartient, tu peux vivre ta propre vie, Natsunagi. »

C’est ce qu’il m’a dit.

Et donc, je suis sûre …

… aujourd’hui, ici et maintenant, ma vie recommence.

Un jour, il y a deux ans

« Hmm-hmm, hmm-hmmmm. »

Même sous un soleil de plomb, alors que nous marchions dans une forêt dense, envahie
par la végétation, ma partenaire fredonnait joyeusement.

« Tu es terriblement de bonne humeur Siesta. »

Nous étions à nouveau en voyage, à la poursuite de — ou peut être poursuivis par —
SPES. Néanmoins, il semblait que la fille qui se qualifiait de brillante détective ne
ressentait absolument pas la tension.

« Eh bien, n’importe quel adulte devrait savoir comment se mettre de bonne humeur, » dit
Siesta en interrompant son fredonnement.

Euh, tu n’es pas encore adulte. Je faillis le dire, mais … je ne savais pas vraiment quel
était son âge. Apparemment, une véritable détective de génie ne révèle pas son identité
aussi facilement. Je veux dire, elle ne m’a même pas encore révélé son vrai nom.

« C’est quel chanson ? » Demandai-je. Elle allait au moins me dire ça.

« C’est une chanson d’idole du Japon. »

« Japon ? De quel pays tu viens ? »

Eh bien, Siesta n’est peut-être pas japonaise.

« D’ailleurs, je ne savais pas que quelqu’un comme toi aimait les idoles. »

« Tout détective digne de ce nom doit être capable de chanter les chansons populaires
d’au moins une idole. »

« Je l’ai déjà dit avant mais je ne comprends vraiment pas ta vision d’un détective. »

Bonjour à tous ! Je suis la populaire brillante détective ! Je chante, je danse et parfois je
combats des pseudo-humains !

… ça me détruirait le cerveau.

« Ce n’est pas ce que je voulais dire. Si tu veux vraiment devenir un détective, tu dois voir
plus de vie. Littéralement. Parmi les cinq sens, la vue et l’ouïe sont particulièrement
importants. »

Voir plus de vie … ? Veut-elle dire de prêter constamment attention au monde qui
m’entoure ? Et de recueillir des informations en utilisant mes yeux et mes oreilles ? Ok,
compris.

« Eh bien, je n’ai pas l’intention de devenir détective, donc ce n’est pas comme si j’avais
besoin de savoir tout ça ? »

« Haaaa. Tu n’es vraiment pas mignon du tout. »

Va te faire voir. Je n’ai pas besoin de ta pitié non plus.

« Je suppose que tu as raison. Tu ne seras jamais détective.»

« Oui, tu vois ? »

« Oui. Je suis sûre qu’à la place, tu seras toujours l’assistant de quelqu’un. »

« …Hmm ? Euh, oui. »

Pour une raison quelconque, on pouvait voir une pointe de solitude dans les yeux de
Siesta. Cependant, cela n’a duré qu’un instant avant que son expression froide habituelle
ne revienne. « Bon, alors ! Nous avons presque atteint notre destination. » Elle désigna un
immense manoir qui ressemblait à un vieux château.

« Tu penses vraiment que Medusa est ici ? »

Medusa — un monstre dont il dit qu’il transforme en pierre quiconque voit se yeux. Nous
avions entendu une rumeur douteuse selon laquelle ce manoir était hanté par ce monstre,
alors nous nous sommes renseignés.

« Je ne saurais dire. Si un tel être existe vraiment, il fera partie de la direction de SPES,
mais … »

« Eh bien, nous ne le saurons pas tant que nous ne l’aurons pas vu. »

J’en avais assez de soupirer et de rouler de yeux, alors je poussai un énorme bâillement à
la place … et Siesta qui marchait à coté de moi prit un moment pour m’étudier.

« Quoi ? » Dis-je.

« … Non. Je pensais juste que tu t’étais habitué à tout ça. »

« Pas par choix. »

En sifflotant, nous nous dirigeâmes vers le manoir de style européen, avec une volé de
corbeaux qui volaient au-dessus de notre tête.

« Eh bien, eh bien ! Encore une fois, merci d’être venus jusque ici. »

Nous nous installâmes sur des chaises face au vieux maître du manoir, qui arborait un
doux sourire.

« Il devait faire chaud dehors. Je dois m’excuser ; j’ai bien peur que la climatisation ne
fonctionne pas en ce moment. »

« Non, ne vous inquiétez pas pour ça. »

Siesta ne transpirait pas le moindre du monde, que soit à cause de la chaleur ou de la
tension. Elle était plus redoutable que jamais. Personnellement, je me disais en silence
que s’il pensait que cela valait la peine de s’excuser, il pouvait au moins ouvrir une fenêtre.

… Mais, nous pouvions probablement nous estimer heureux que le pire scénario, que
nous avions prévu, ne ce soit pas produit.

Franchement, nous avions supposé que les combats allaient commencer dès que nous
aurions frappé à la porte — mais au lieu de cela, nous avions reçu un accueil inattendu.
Comme vous l’avez peut-être deviné dans la conversation précédente, Siesta et moi
avions dit que nous étions venus à cause de cette rumeur, et l’homme se présenta comme
le maître du manoir et nous invita volontairement à entrer.

Il nous fît entrer dans le salon, et nous nous sommes immédiatement mis au travail, en
espérant apprendre la vérité sur la « Méduse ».

« Dans ce cas, dois-je supposer que vous êtes au courant de cette rumeur particulière
monsieur ? »

Quand Siesta posa sa question, son expression et sa posture étaient résolues.

« Oui, en effet, je le suis. On parle d’une Méduse qui transforme en pierre tous les
visiteurs d’ici … Je crois qu’il s’agit de ma fille. De ma fille adoptive pour être plus précis ;
nous ne sommes pas liés par le sang. » Alors qu’il parlait, l’expression de l’homme devint
sinistre.

« Vous n’êtes pas entrain de nous dire qu’elle est vraiment — ?! »

« Non, c’est un malentendu ! » L’homme se leva, agité par ma question. « Il y a deux ans,
ma fille eut un accident. Heureusement, elle eut la vie sauve, mais … seulement la vie ! »

« – Un état végétatif persistant, » précisa Siesta.

L’homme acquiesça , l’air angoissé. « Ma fille est inconsciente et incapable de bouger. Elle
ne fait que cligner des yeux et respirer. D’une certaine manière, elle est en pierre ! Ils ont
pris le problème à l’envers ! Ma fille n’est pas Médusa. Elle est une victime, transformée
en pierre par ce monstre mythique ! »

« Alors vous dites que l’information a été déformée, et que c’est la rumeur qui s’est
répandue ? » Dis-je.

« Je suppose que c’est la seule explication. » L’homme hocha faiblement la tête,
acquiesçant à ma supposition. Après cela, pendant un petit moment, le silence s’installa
dans la pièce. « … Ah, je vous demande pardon. Quelle honte, je me suis laissé aller à la
déchéance. Il fait vraiment humide,n’est-ce pas ? Je vais aller vous chercher quelque
chose de froid à boire. »

Finalement, se ressaisissant, l’homme se retira un instant.

« On dirait qu’on a frappé un grand coup ici. »

Apparemment, le SPES n’était pas impliqué dans cet incident. D’ailleurs, ce n’était même
pas un incident. Eh bien, si nous n’avions pas de problèmes supplémentaires, je n’allais
pas me plaindre. Nous avons juste accepté ces boissons fraîches, puis nous sommes
rentrés. La chaleur me faisait vraiment souvenir maintenant, alors je défis quelques
boutons de ma chemise.

« Pourquoi tu ne te déshabilles pas aussi ? » la taquinai-je.

« Es-tu stupide Kimi ? »

« Hé ! »

Toujours sans expression, Siesta tapa fortement sur mon pied. Regarde-moi au moins,
d’accord ?

« Mes excuses pour l’attente. » L’homme revint, portant un plateau avec des verres.
J’essayai d’en prendre un mais —

« Hey ! »

— Siesta m’écrasa le pied de nouveau, et je basculai violemment en avant. Naturellement,
le contenu des verres éclaboussa partout, trempant tout.

« Siesta, espèce de petite – ! »

« C’est pour m’avoir harcelée sexuellement. »

« Mais tu m’as déjà piétiné pour ça. »

Siesta ne semblait même pas entendre ma plainte. Elle s’approcha de l’homme, dont les
vêtements avaient été mouillés, et commença à les sécher avec son mouchoir.

« Je suis profondément désolée. Mon assistant a fait une terrible gaffe. »

Quoi, comme si c’était ma faute ? C’est tellement injuste …

« Ha-ha, il n’y a pas de mal … Mais si je pouvais vous donner une tâche, viendriez-vous
rencontrer ma fille ? Nous n’avons pas souvent d’invités, et je suis sûr qu’elle sera ravie. »

« Oui, bien sûr. »

Siesta lui fit son plus beau sourire.

« Mary, regarde, tu as des invités. »

La maître du manoir nous conduisit à une chambre au troisième étage, où la fille, Mary,
était allongée dans un lit à baldaquin. Elle était délicate, avec des cheveux d’un blond
éclatant, et ses yeux clignotant mécaniquement étaient verts jade. Je dirais qu’elle était
aussi jolie qu’une poupée — mais elle ne l’était pas. Elle était sous respirateur, luttant
désespéramment pour vivre. Mary n’était pas une poupée.

Ressentant un sentiment inconfortable de regret, je détournai le regard, laissant la
situation entre les mains de Siesta. Peut-être était-ce la culpabilité, mais j’avais un peu de
mal à respirer.

« Oh, ma pauvre Mary. Tu es si belle, et pourtant les gens hors de la forêt te traitent de
monstre. C’est trop dur à supporter. »

L’homme enfouit son visage dans ses mains, se lamentant sur la tragédie qui s’était
abattue sur sa fille.

… Oh. Cela pourrait être la raison pour laquelle il nous a accueillis. Un détective de génie
aurait compris que sa fille n’était pas Medusa, ni un monstre. Il pensait que nous allions
mettre les choses au clair.

« Oui, » dis-je, « nous dirons aux gens en dehors de la forêt que la rumeur n’est pas —  »

J’essayai de marcher vers l’homme — mais la dernière chose que je vis, était le sol en
face de mon visage.

… Le sol ? Je sui tombé ? Pourquoi ?

Pour une raison quelconque, mon corps se sentait faible.

« Tout va bien Mary. Je te fais plus d’amis maintenant. »

… Qu’est-ce qu’il disait ?

En bougeant ma tête, qui pouvait bouger un peu, je levai les yeux vers le vieil homme.

Le gars souriait.

« Ha-ha, ha-ha-ha. Tout va bien, tu n’as pas à avoir peur. Ça ne fera pas mal. Il n’y a rien
à craindre. » Il sortir une seringue de la poche de son pantalon et enfonça l’aiguille dans
son propre bras droit. Je n’avais aucune idée de ce à quoi il pensait.

« Tu pensais que j’allais te poignarder ? Ha-ha. C’est un antidote. Après tout, le poison est
dans cette pièce depuis le début. »

Qu…Quoi ? Donc la raison pour laquelle je m’engourdis c’est …

« D’ici peu, vos corps cesseront toute activité physique. Vous finirez comme Mary,
incapables de faire un pas, mais incapables de mourir. Vous souffrirez pour l’éternité ! »

… Je … vois. C’est donc pour ça que toutes les fenêtres étaient fermées … De plus, il
avait dit que la seule chose que Mary pouvait faire était de respirer par elle-même. Il l’
quand même mise sous respirateur, pour la protéger du poison. J’aurais dû le remarquer
plus tôt.

« Maintenant, très bientôt, vous et la détective de génie deviendrez les compagnons de
Mary … ses … compagnons … »

C’est alors qu’un changement abrupt se produisit chez l’homme. Ses yeux s’ouvrirent
comme si quelque chose l’avait fait sursauter … et puis ses genoux se dérobèrent et
l’envoyèrent au sol, face contre terre, exactement comme moi.

« P-pourquoi… ? »

Alors qu’il murmurait son désespoir, la personne qui s’approcha de lui … était exactement
celle à laquelle vous pensez.

« Tiens-toi bien. »

En retenant l’homme avec les menottes qu’elle portait toujours, elle prit le mousquet
qu’elle cachait derrière son dos et brisa la fenêtre … ce qui permit au poison de se diffuser
à l’extérieur.

Une fois qu’elle s’occupa de ça, la brillante détective se retourna finalement et s’adressa à
son assistant qui rampait sur le sol.

« T’es stupide Kimi ? »

Je vois. Pas étonnant qu’elle m’ait piétiné le pied deux fois.

« Donc tu avais déjà compris ce qu’il cherchait. »

Nous étions sur le chemin du retour du manoir, après avoir rempli tous les rapports et la
paperasse appropriée et que tout ait été réglé. Mon corps était encore engourdi, donc
Siesta me portait sur son dos.

« Mm-hmm. Je ne peux pas croire que tu as presque accepté cette boisson ; c’était
tellement évident. »

« Écoute, j’ai dit que j’étais désolé … »

Les boissons avaient probablement été, elles-aussi, empoisonnées. Siesta avait écrasé
mon pied pour me protéger … N’y avait-il pas une manière plus douce et gentille de le
faire ?

« A l’instant … Pendant que tu as utilisé ce mouchoir pour sécher ses vêtements, tu as
échangé la seringue avec l’antidote ? »

« Exactement. Puis je l’ai utilisée, donc ça allait. »

Comme toujours, elle avait juste fait ce qu’elle voulait. Elle s’occupait de ses affaires toute
seule, sans consulter personne d’autre. Bien que le fait que je ne puisse pas la suivre
pouvait être une partie du problème.

« Bien sûr, tout cela n’était que des preuves circonstancielles. Je n’en étais pas certain
jusqu’à ce que je voie les yeux de Mary. »

« Ses yeux ?  Mais n’était-elle pas inconsciente ? »

« Non, elle clignait désespéramment des yeux, nous suppliant. Ce mouvement était tout à
fait régulier, pas automatique… Il y avait une intention derrière. Je suis sûre qu’elle
essayait de nous parler des méfaits de son père adoptif. »

Ainsi, sous l’emprise de la folie, l’homme n’avait pas remarqué le signal de sa propre fille.
Cette pensée m’a parue pathétique … Ou peut-être juste triste.

« Bon travail de repérage. »

« Tu es stupide Kimi ? »

« C’est la troisième fois aujourd’hui. C’est tellement injuste … »

Eh bien, aujourd’hui je n’avais pas d’excuses à donner.

« As-tu oublié ce que j’ai dit sur le chemin du manoir ? A propos de voir plus de monde et
l’importance de perfectionner ta vue et ton ouïe ? Tu devrais aussi être plus sensible au
regard des autres. »

« Je vois. C’est pour ça que tu es une brillante détective. »

En terme d’auto-défense, je suppose que c’est une compétence dont je pourrais avoir
besoin plus tard.

« Hey, Siesta. »

« Hmm ? »

Donc, tout d’abord, je commencerais par faire comme Siesta m’a conseillé et en
apprendre plus sur le monde.

« Pourrais-tu me dire le nom de l’idole dont tu fredonnais la chanson aujourd’hui ? »

Je ne pouvais voir que son visage de profil, mais elle avait l’air satisfaite.

« Son nom est —  »

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